Marchés et économie

Dénicher des victoires dans un premier trimestre confus pour les marchés mondiaux

Homme qui regarde par la fenêtre de son bureau.
Points importants à retenir
Un T1 confus
1

Le premier trimestre a été ponctué de fluctuations des marchés, alors que les « propos bellicistes des dirigeants des banques centrales » proliféraient et semaient la confusion.

Une remise en perspective
2

Je remets en perspective l’évolution des marchés mondiaux au premier trimestre et je souligne quelques « petites victoires » qui auraient facilement pu passer inaperçues. 

La désinflation aux États-Unis
3

L’indice des prix des dépenses de consommation personnelle de base pour mars a procuré un certain répit et reçu un vote de confiance de la part du président du conseil de la Réserve fédérale américaine, Jay Powell. 

À la sortie de l'église le dimanche de Pâques, j’ai croisé un conseiller financier que je connais et lui ai demandé ce que ses clients et ceux de ses collègues leur disaient après un trimestre aussi impressionnant. Il m'a répondu qu'ils n'arrivaient pas à comprendre ce qui se passait sur les marchés. Ce n'est pas surprenant. Le premier trimestre a été ponctué de fluctuations des marchés, alors que les « propos bellicistes des dirigeants des banques centrales » proliféraient et semaient la confusion. Dans cet article, je remets en perspective l'évolution des marchés mondiaux au premier trimestre et je souligne quelques « petites victoires » qui auraient facilement pu passer inaperçues.

Tour d'horizon des marchés au premier trimestre

Actions. Les marchés boursiers mondiaux ont connu un très bon premier trimestre, à quelques exceptions près.1 Les marchés japonais ont été les plus performants, ils ont enregistré des gains dans les deux chiffres. Les marchés américains sont arrivés bon deuxièmes, car l’indice S&P 500 a lui aussi progressé de plus de 10 %. Les marchés européens ont également inscrit des gains appréciables, tandis que ceux des marchés britanniques ont été plus modestes. Les marchés émergents ont aussi dégagé de faibles gains, tandis que ceux de la Chine, en particulier, ont perdu un peu de terrain au premier trimestre, ce qui a accentué la survente.

Titres à revenu fixe. Dans l’ensemble, les titres à revenu fixe2 ont obtenu des résultats décevants au premier trimestre (à l'exception des obligations des marchés émergents). Par contre, les obligations mondiales ont enregistré de meilleurs rendements en mars. La volatilité des titres à revenu fixe n’est pas surprenante, compte tenu des fortes fluctuations du taux des bons du Trésor américain à 10 ans, qui est passé de moins de 4 % à plus de 4,3 % au cours du trimestre.3

Placements alternatifs. Les catégories d’actifs alternatives ont enregistré des résultats trimestriels disparates.4 Les fiducies de placement immobilier mondiales ont perdu du terrain au cours du trimestre, malgré un bon mois de mars.  Les produits de base, en particulier l’énergie, ont connu un bon trimestre. Les métaux industriels ont été relativement stables pendant le trimestre, mais ont fortement progressé en mars. Le prix de l’or a grimpé pendant le trimestre, tout comme celui du bitcoin. Les principales devises se sont dépréciées par rapport au dollar. 

Les marchés anticipent le début des baisses de taux

Comme je l'ai mentionné au début, nous avons assisté à des fluctuations des marchés tout au long du trimestre et les propos des dirigeants des banques centrales ont semé la confusion. Alors, que s'est-il passé? En gros, le trimestre a été caractérisé par la prise de risque; les investisseurs ont somme toute fait fi des données décevantes et des propos bellicistes des dirigeants des banques centrales, hormis quelques réactions négatives au début de la période. Les marchés réagissent en fonction de ce à quoi ils s'attendent cette année, à savoir que la désinflation dans les pays développés occidentaux va se poursuivre et que les banques centrales vont amorcer des baisses de taux. Les marchés anticipent aussi un léger et bref ralentissement de l'économie mondiale, suivi d'une réaccélération. Voilà pourquoi je crois que nous avons assisté à un élargissement des marchés ces dernières semaines.

Quelques petites victoires pour commencer le deuxième trimestre

Le premier trimestre 2024 s'est achevé sur quelques petites victoires :

  • Les États-Unis sont toujours dans le « train D », car la désinflation s'est poursuivie en mars. La trajectoire de l’inflation aux États-Unis a soulevé des craintes après la publication de données décevantes sur l’inflation, de sorte que l’indice des prix des dépenses de consommation personnelle (DCP) de mars a été un véritable soulagement. L’indice DCP de base s’est établi à 2,8 % en glissement annuel, en légère baisse par rapport aux 2,9 % enregistrés en février.5 Cette donnée a reçu un vote de confiance de la part du président du conseil de la Réserve fédérale américaine, Jay Powell, qui a déclaré qu’elle était « davantage conforme à ce que nous voulions voir » et a ajouté qu’il était « bon de voir une donnée conforme aux attentes ».6 Il a renchéri en disant que, malgré des hauts et des bas, il prévoit toujours que « l’inflation va continuer de baisser jusqu’à 2 % ».7
  • Le Royaume-Uni et la zone euro continuent de faire des progrès en matière d'inflation. L'inflation dans la zone euro a aussi continué à baisser et se rapproche désormais de la cible de 2 % de la Banque centrale européenne. L’inflation au Royaume-Uni a fait encore plus de progrès dernièrement; son plus récent taux était de 3,4 % sur douze mois en février, son plus bas taux depuis 2021 et un taux inférieur aux attentes.8
  • Les anticipations d’inflation sont désormais plus ancrées. Comme je l’ai déjà dit, les anticipations d’inflation, en particulier celles des consommateurs, sont des considérations importantes pour les banques centrales. Voilà pourquoi le sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs pour le mois de mars a été réconfortant. Comme les anticipations d’inflation sur cinq ans ont baissé à 2,8 % et que celles sur un an ont fléchi à 2,9 %, je crois qu’on peut affirmer sans craindre de se tromper que les anticipations d’inflation sont « bien ancrées »; c’est un test décisif pour la Fed.9 Il en va de même au Royaume-Uni, où un récent sondage de la Banque d’Angleterre a révélé que le taux d’inflation médian anticipé pour la prochaine année s’établit à 3 %, en baisse par rapport au taux de 3,3 % du sondage précédent. À plus long terme, les anticipations d’inflation des consommateurs ont régressé à 3,1 % et se rapprochent de la cible de la Banque d’Angleterre.10 Cette tendance a été confirmée par le sondage Citi/Yougov, qui a également montré une baisse des attentes des consommateurs en matière d’inflation, à la fois à court et à long termes.11

Cela nous indique que certaines banques centrales des grandes puissances économiques occidentales pourraient amorcer des baisses de taux dès la fin du deuxième trimestre.

Les petites victoires se sont poursuivies au début du deuxième trimestre :

  • Une agréable surprise économique pour la Chine. Les marchés ont fortement réagi aux données de l'indice des gestionnaires en approvisionnement (PMI) Caixin du secteur manufacturier de la Chine publiées hier, qui étaient meilleures que prévu. Comme je l'ai déjà dit, je crois que les actions chinoises étaient survendues, de sorte que la moindre bonne surprise pourrait s'avérer un puissant catalyseur pour faire grimper les cours. 
  • Les données manufacturières américaines sont meilleures que prévu. L'indice PMI manufacturier des États-Unis compilé par l'ISM a agréablement surpris; il est passé en zone d'expansion pour la première fois depuis septembre 2022. Le sous-indice des nouvelles commandes a été particulièrement fort, ce qui augure bien pour la suite. 

Il n’y a pas que de bonnes nouvelles :

  • L’indice PMI manufacturier des États-Unis compilé par l’ISM n’a pas plu aux marchés. Il est vrai que le sous-indice des prix a lui aussi augmenté, mais il semble que cette hausse soit en grande partie attribuable aux prix des produits de base, qui sont parfois très volatils. Quant au sous-indice de l’emploi, même s’il a augmenté, il reste modéré. Rien dans ce rapport ne m’a fait changer d’avis quant à la date à laquelle la Fed commencera à réduire les taux d’intérêt.
  • Le rapport Tankan de la Banque du Japon (BdJ) sur l’économie japonaise est mitigé et l’un des points décevants est la baisse de confiance des propriétaires d’entreprises. Cette baisse aurait entraîné des prises de bénéfices, mais il fallait s’y attendre après les excellents rendements boursiers enregistrés au premier trimestre. Et, ce qui est peut-être plus important, le sondage a révélé que les propriétaires d’entreprises s’attendent à ce que l’inflation reste supérieure à la cible de 2 % de la BdJ au cours des cinq prochaines années.12 Il est clair que les propriétaires d’entreprises ont confiance dans la BdJ et dans l’économie japonaise.

Voici ce que nous allons surveiller

Le rapport sur l’emploi aux États-Unis sera évidemment dans notre mire cette semaine. Je vais porter mon attention uniquement sur le salaire horaire moyen, car je doute que la Fed se préoccupe de savoir si le nombre d’emplois non agricoles est plus élevé que prévu; elle se concentrera sur la croissance des salaires, en raison de son impact direct sur l’inflation. L’indice des prix à la consommation (IPC) de la zone euro sera une autre donnée importante à surveiller cette semaine, ainsi que le sondage sur les postes à pourvoir et le roulement de personnel (Job Openings and Labor Turnover Survey ou rapport JOLTS) des États-Unis pour avoir une idée si le marché du travail américain va continuer de ralentir (la Fed n’attend pas après cela pour amorcer des baisses de taux, mais ce serait bien de voir une réduction du nombre de postes à combler).

Le procès-verbal de la plus récente réunion de la Banque centrale européenne est un autre événement à suivre cette semaine. Je passerai ce procès-verbal au crible pour avoir une meilleure idée de la date à laquelle les baisses de taux pourraient commencer (à l’heure actuelle, on s’attend à ce qu’elles débutent en juin) et pour mieux évaluer la cadence anticipée de ces baisses de taux.

Dates à surveiller

Date

Événement

Ce qu'il nous dit

2 avril

IPC de l’Allemagne

Suit la trajectoire de l'inflation.

 

Rapport JOLTS des États-Unis

Génère des données sur le nombre de postes à combler, l’embauche et les départs.

3 avril

IPC de la zone euro

Suit la trajectoire de l'inflation.

 

Indice PMI non manufacturier des États-Unis compilé par l’ISM

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

4 avril

Indice PMI du Royaume-Uni

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

 

Indice PMI composé de la zone euro

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

5 avril

Rapport sur le marché de l’emploi aux États-Unis

Mesure la santé du marché du travail.

 

Rapport sur l’emploi au Canada

Mesure la santé du marché du travail.

Notes de bas de page

  • 1

    Rendement boursier compilé par Bloomberg et MSCI, selon l’indice MSCI Japon, l’indice MSCI Europe excluant le R.-U., l’indice MSCI du Royaume-Uni, l’indice MSCI Marchés émergents, l’indice MSCI Chine et l’indice S&P 500, du 1er janvier au 31 mars 2024.

  • 2

    Rendement des marchés des titres à revenu fixe compilé par Refinitiv Datastream, selon l’indice Bank of America Merrill Lynch Global Bond, l’indice Bloomberg US Aggregate Bond, l’indice Bloomberg Global Aggregate Credit et l’indice Bloomberg Emerging Markets Bond, du 1er janvier au 31 mars 2024.

  • 3

    Source : Bloomberg, au 29 mars 2024

  • 4

    Rendement du marché des placements alternatifs compilé par Refinitiv Datastream, selon l’indice FTSE Global REIT, l’indice S&P GSCI Commodity, l’indice S&P GSCI Energy, l’indice S&P GSCI Industrial Metals, l’indice S&P GSCI Precious Metals et l’indice S&P GSCI Agricultural Goods.

  • 5

    Source : Bureau de l’analyse économique des États-Unis, au 29 mars 2024

  • 6

    Source : Reuters, « New US inflation data ’along the lines’ of what Fed wants, Powell says », 29 mars 2024

  • 7

    Source : PBS NewsHour, « Powell says the Federal Reserve wants to see ‘more good inflation readings’ before it can cut rates », 29 mars 2024

  • 8

    Source : UK Office for National Statistics, 20 mars 2024

  • 9

    Source : Université du Michigan, Sondage sur les attentes des consommateurs, 29 mars 2024

  • 10

    Source : Banque d’Angleterre/Sondage Ipsos sur les attitudes des consommateurs, 15 mars 2024

  • 11

    Source : Sondage Citi/Yougov, 28 mars 2024

  • 12

    Source : Sondage Tankan, 1er avril 2024