Marchés et économie

Au-dessus de la mêlée : Mettre l'accent sur les gains boursiers hors norme

Personne qui regarde dans le rétroviseur latéral en roulant sur une route montagneuse enneigée.
Points importants à retenir
Attentes d'un « atterrissage en douceur »
1

À moyen terme, je crois que la chute de l’inflation et le ralentissement (pas l’effondrement) de la croissance vont continuer de favoriser les actions cycliques et les titres de créance plus risqués. 

Saison des élections américaines
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C’est le moment pour nos politiciens de nous faire peur et de tenter de nous persuader que nos comptes d’investissement sont en danger si l’autre candidat l’emporte. Les données disent le contraire.

Perturbations du transport maritime
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Les perturbations du transport maritime en mer Rouge risquent-elles de provoquer le type d'inflation que nous avons connu au début des années 2020? Je ne crois pas.

La situation s’est détériorée rapidement, comme le dirait Ron Burgundy. En fait, même si cela peut sembler paradoxal, j’aurais préféré que la progression de l’ensemble du marché (et pas seulement des « sept magnifiques ») n’ait pas été aussi rapide en novembre et décembre.1 Ne vous méprenez pas. Nous avons été très heureux d’assister à la chute des taux d’intérêt à la fin de l’année2, accompagnée d’une reprise généralisée des marchés boursiers américains3. Tout au long de l’année, nous avons répété aux investisseurs qui disposent de beaucoup de liquidités de réintégrer les marchés en « immobilisant » les taux de rendement des obligations à plus longue échéance et/ou d’investir dans des actions pour profiter du fait que le marché s’adapte de plus en plus au scénario d’un « atterrissage en douceur » de l’économie. J’aurais préféré que ce « marché haussier tous azimuts » s’étale sur plusieurs trimestres, ce qui aurait donné aux investisseurs suffisamment de temps pour en profiter.

Qu’est-ce que l’avenir nous réserve? Au début de janvier, les marchés ont donné l’impression de n’aller nulle part (un peu comme la conférence de l’Est de la NFL), avant de se redresser et d’atteindre de nouveaux sommets. Il a peut-être fallu remédier à une situation de surachat à la fin du quatrième trimestre. Les gains hors-norme enregistrés par l’ensemble des capitalisations boursières sont peut-être chose du passé, du moins pour le moment. Après tout, le marché escompte six baisses de taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine (Fed) d’ici quelques semaines et la Fed pourrait très facilement décevoir.4 En outre, la croissance ralentit aux États-Unis.5 Toutefois, à court terme (3-6 mois), nous ne serions pas surpris de voir les actions de meilleure qualité revenir en tête à mesure que l’économie va ralentir et que le marché va potentiellement recalibrer ses attentes en matière de baisses de taux d’intérêt. À moyen terme (6-12 mois), je crois que la baisse de l’inflation et le ralentissement, mais non l’effondrement, de la croissance favoriseront toujours les actions cycliques et les titres de créance plus risqués.

Le moment est déjà venu

La saison électorale a commencé aux États-Unis. Vous savez ce que cela signifie!  C’est le moment pour nos politiciens de nous faire peur et de tenter de nous persuader que nos comptes d’investissement sont en danger si l’autre candidat l’emporte. 

  • En 2020, Donald Trump avait déclaré que s’il perdait les élections présidentielles : « votre 401(k) sera réduit à néant, les valorisations boursières vont tomber à zéro. »6
  • En 2016, Hillary Clinton avait déclaré ceci : « (Trump) croit qu’il peut traiter l’économie américaine comme l’un de ses casinos et faire défaut sur nos dettes... ce qui provoquerait une catastrophe économique bien pire que tout ce que l’on a connu en 2008 »7

La rhétorique peut faire très peur. Du moins, jusqu’à ce que l’on examine les données. Voici un graphique qui montre ce qui s’est produit pendant les 800 jours qui se sont écoulés entre l’élection de Donald Trump en 2016 et les 800 jours qui ont suivi la victoire de Joe Biden aux élections de 2020. Trump est en tête, mais la tendance est remarquablement similaire.8 Les chiffres peuvent faire dérailler les tactiques de campagne.

En dépit des mises en garde de leurs adversaires, les marchés boursiers ont enregistré des gains substantiels sous la présidence de MM. Trump et Biden 

C’est peut-être un biais de confirmation, mais…

…les craintes entourant les valorisations boursières sont exagérées, car ces dernières n’ont pas été un outil fiable pour les investisseurs à long terme. S’il est vrai que l’indice S&P 500 est cher en ce moment, les valorisations élevées ne constituent pas à elles seules une bonne raison de sous-pondérer les actions.

C’est ce que montre le tableau ci-dessous, qui retrace le rendement total de l’indice S&P 500 et met en évidence les moments où l’indice a atteint une valorisation dans le 10e décile, autrement dit, alors qu’il était plus cher qu’il ne l’avait été 90 % du temps. Au cours des deux derniers marchés haussiers, les actions américaines ont continué à progresser même lorsque les valorisations ont atteint le 10e décile. Les investisseurs qui se sont retirés de ces marchés haussiers en raison des valorisations élevées auraient payé un coût de renonciation élevé, car les rendements ont continué d’augmenter.9

À titre de comparaison, entre octobre 2017 (lorsque les valorisations des actions américaines ont atteint le 10e décile pour la première fois depuis des décennies) et le pic du marché qui a suivi en décembre 2021, le cours de l’indice a presque doublé.10 Cela signifie que ceux qui s’étaient retirés des actions américaines au cours de cette période se seraient privés d’un gain ultérieur de 100 %!

Les actions américaines ont l'habitude de se redresser même lorsque les valorisations ont atteint des niveaux élevés

Indice S&P 500

10e décile atteint Sommet cyclique atteint Rendement total pendant la  période
Juin 1997 Août 2000 79 %
Octobre 2017 Décembre 2021 100 %
Janvier 2020 Décembre 2021 52 %
Août 2020 Décembre 2021 39 %

Source : Bloomberg et Département d’économie de l’université Yale, données jusqu’au 30/09/2023, au 16/01/2024. Les rendements passés ne sont pas garants des rendements futurs. Il est impossible d’investir directement dans un indice. 

Vu que vous avez posé la question (Partie 1)

Q : Quel est le plus gros risque qui plane sur les marchés boursiers?

R : Le marché a adopté le scénario de « l’atterrissage en douceur », selon lequel l’inflation aux États-Unis va revenir dans la « zone de confort » perçue par la Fed sans que l’activité économique en souffre de manière significative. Est-ce trop optimiste? L’ancien secrétaire du Trésor américain, Lawrence Summers, a qualifié les atterrissages en douceur de « triomphes de l’espoir sur l’expérience ».11 Je crois que le scepticisme de M. Summers est raisonnable, mais cela ne devrait pas nécessairement influencer notre scénario de référence. Une récession (un atterrissage brutal de l’économie) ne semble pas se profiler à l’horizon, compte tenu de l’absence d’excès cycliques dans l’économie12 et du faible effet de levier des entreprises.13

Revenons à la question. À ce stade-ci du cycle économique, le risque serait une détérioration significative de la croissance économique, ce qui ne correspond pas à nos prévisions. Une réaccélération de l’inflation ne figure pas en tête de ma liste des risques pour 2024.

À ce propos…

Vu que vous avez posé la question (Partie 2)

Q : Si, en fin de compte, nous assistons à un ralentissement en milieu de cycle, suivi d’un revirement de la Fed comme en 1995, alors pourquoi détenir autre chose que des actions de croissance au cours des prochaines années?

R : On se souvient du milieu et de la fin des années 90 pour l’envolée spectaculaire des titres américains de croissance. Cependant, il ne faut pas oublier que les titres de valeur ont gagné 120 % entre la date de la dernière hausse des taux de la Fed en février 1995 et la fin de 1997, et ont légèrement dépassé les titres de croissance.14 Le rendement nettement supérieur des titres de croissance a été enregistré au cours des deux dernières années de la décennie, avant d’être effacé au début de 2002, suivi d’un rendement nettement supérieur des titres de valeur jusqu’à la crise financière mondiale.14

C’est une excellente question et une bonne leçon d’histoire. Cependant, ce n’est pas ce sur quoi nous nous basons pour élaborer nos points de vue. Nous allons continuer à utiliser notre analyse tactique du contexte politique pour évaluer le potentiel de croissance économique et l’orientation de la confiance des investisseurs afin de déterminer nos perspectives.

Quelqu’un a dit

« …même si les aspects économiques des événements de la mer Rouge ne sont pas fameux, il n’y a pas de quoi s’inquiéter outre mesure...rien de ce qui se passe au Moyen-Orient n’entraînera de perturbations d’une ampleur qui a rendu l’inflation si élevée et si généralisée. » – Paul Krugman, éditorialiste au New York Times

Commençons par la mauvaise nouvelle. La perturbation d’une voie de communication majeure pour le commerce mondial n’est pas idéale lorsque la prédiction d’un marché haussier à moyen terme repose sur la prémisse voulant que l’inflation va continuer de diminuer. Les attaques du mouvement Houthi du Yémen contre les navires marchands ont obligé les grandes sociétés de transport maritime à contourner le cap de Bonne-Espérance, à la pointe sud de l’Afrique, au lieu de passer directement par le canal de Suez dans la mer Rouge, ce qui leur coûte jusqu’à 1,5 à 2 millions de dollars de plus en frais de carburant par navire.15 Comble de malchance, environ 15 % du commerce mondial transite par la mer Rouge, dont 12 % du pétrole et 8 % du gaz naturel liquéfié du monde.16 Comme le dit Krugman, « ce n’est pas rien ».

Maintenant, la nouvelle plus réjouissante. La cause première de l’inflation généralisée du début des années 2020 n’était pas les problèmes de transport maritime, même si les navires en attente dans les ports de Los Angeles sont devenus l’image emblématique du moment. L’inflation est plutôt due au fait que les entreprises ont réagi à la pandémie en réduisant désespérément leurs stocks et leurs effectifs, au moment même où les consommateurs se lançaient dans une frénésie de dépenses. On pourrait imputer la faute à une fâcheuse coïncidence! Aujourd’hui, les entreprises ont reconstitué leurs stocks17 et le nombre total d’emplois aux États‑Unis n’a jamais été aussi élevé.18 Parallèlement, on prévoit une diminution des dépenses de consommation. La conjoncture actuelle est très différente et ne semble pas propice à une réaccélération de l’inflation.

J’aimerais téléphoner à un ami

Dans quelle mesure les investisseurs devraient-ils craindre que la Fed déçoive les marchés en procédant à moins de six baisses de taux d’intérêt en 2024?  J'ai posé la question à Matt Brill, chef des obligations américaines de qualité d’Invesco. Voici sa réponse :

« C’est certes une question différente de celle que l’on m’a posée la dernière fois cette année! Il est étonnant de voir à quelle vitesse les choses peuvent évoluer. Je compare cela à la vitesse à laquelle les enfants changent sur les photos prises le premier jour de l’école et le dernier. L’année dernière, peu de gens nous ont crus lorsque nous avons dit que la Réserve fédérale américaine procéderait à des baisses de taux dès la première moitié de 2024. Aujourd’hui, c’est le consensus. Selon moi, le nombre de baisses de taux qui auront lieu cette année n’a pas beaucoup d’importance. Je crois que le cycle de resserrement monétaire de la Fed est terminé et que l’avenir sera plus facile à gérer que les 21 derniers mois. »

Automatiser mon travail?

Chaque mois, je pose une question à ChatGPT, robot conversationnel qui a recours à l’intelligence artificielle, et j’évalue sa réponse.

Q : Le fait qu’on assiste ou non à un atterrissage en douceur est-il important pour les marchés?

R : Oui, le type d'atterrissage de l’économie, qu'il se fasse en douceur ou non, peut avoir un impact sur les marchés financiers. Un atterrissage en douceur, caractérisé par un ralentissement économique graduel, est généralement préférable car il minimise les perturbations. Un atterrissage brutal, marqué par un ralentissement économique marqué, peut entraîner une volatilité et une incertitude accrues sur les marchés.

Cette réponse m’a laissé sur mon appétit. ChatGPT, peux-tu me fournir des preuves statistiques!

J’aurais comparé des années comme 1995 et 2015, où l’économie a ralenti mais ne s’est pas effondrée, avec des années comme 1981 et 1991, qui ont été marquées par de légères récessions. Les rendements du sommet au creux associés aux ralentissements de milieu de cycle se sont élevés respectivement à 9 et 13 %, contre des baisses respectives de 27 et 19 % au cours des années de récession de 1981 et 1991.19

Sur la route

Je me suis rendu à Beverly Hills, en Californie, pour rencontrer des clients. Le prix des cocktails m’a paru exorbitant, mais on m’a dit que les prix n’étaient pas si différents de ceux de New York. Je suppose que je ne sors plus aussi souvent qu’avant. Quoi qu’il en soit, 25 dollars pour un verre de 5 onces de vin blanc maison me semblait excessif. Les clients m’ont exhorté à justifier mon point de vue selon lequel l’inflation est chose du passé compte tenu du coût de nos boissons. Voici en gros comment s’est déroulée la conversation :

Moi : Combien coûtait cette boisson en 2019?

Eux : 17 $.

Moi : Combien coûtait cette boisson l’année dernière?

Eux : 25 $.

Moi : Dans ce cas, l’inflation est de zéro pour cent sur douze mois. La Réserve fédérale américaine ne se préoccupe pas du niveau des prix. Son objectif est la stabilité des prix. Elle se préoccupe du niveau de variation, qui dans ce cas est zéro.

Eux : Peut-être, mais mon portefeuille, lui, s’en préoccupe.

Moi : Je vous comprends.

Bienvenue en février!

Notes de bas de page

  • 1

    Source : Bloomberg, 31/12/2023. Représentés par les rendements pour la période de 2 mois terminée le 31/12/2023 de l’indice S&P 500 (+13,74 %), de l’indice Russell 2000 (+21,95 %), de l’indice Russell des sociétés à moyenne capitalisation (+18,28 %), de l’indice Russell 1000 des titres de valeur (+12,95 %) et de l’indice Russell 1000 des titres de croissance (+15,63 %).

  • 2

    Source : Bloomberg, 31/12/2023. Représentés par le taux des bons du Trésor américain à 10 ans.

  • 3

    Source : Bloomberg, 31/12/2023. Résultats basés sur les rendements de l’indice S&P 500.

  • 4

    Source : Bloomberg, 18/01/2024. Résultats basés sur les taux implicites des contrats à terme sur fonds fédéraux.

  • 5

    Source : Invesco, 31/12/2023. Résultats basés sur les données de l’Indicateur économique avancé exclusif de Invesco Solutions.

  • 6

    Source : MarketWatch, 02/07/2020.

  • 7

    Source : The Wall Street Journal, 02/06/2016.

  • 8

    Sources : Invesco et Bloomberg, 17/01/2024. Résultats basés sur les rendements de l’indice S&P 500.

  • 9

    Sources : Bloomberg, Département d'économie de l’Université Yale, données du 30/09/2023 au 16/01/2024.

  • 10

    Sources : Invesco et Bloomberg. Résultats basés sur les rendements de l’indice S&P 500.

  • 11

    Source : Yahoo!Finance, 18/01/2023.

  • 12

    Sources : Bloomberg, Realtor.com et U.S. Census Bureau, 31/12/2023. D’après l’offre de logements aux États-Unis : Nombre d’inscriptions actives et ratio stocks-ventes sur le marché immobilier résidentiel aux États-Unis.

  • 13

    Source : Réserve fédérale américaine, 30/09/2023. Selon les plus récentes données disponibles. Basé sur la variation en pourcentage sur douze mois de la dette et du passif des entreprises non financières.

  • 14

    Source : Bloomberg, 31/12/2023. Selon le rendement de l'indice Russell 1000 des titres de valeur comparativement à celui de l'indice Russell 1000 des titres de croissance.

  • 15

    Source : S&P Global Market Intelligence, 18/01/2024.

  • 16

    Source : S&P Global Market Intelligence, 18/01/2024.

  • 17

    Source : U.S. Census Bureau, 31/12/2023.

  • 18

    Source : US Bureau of Labor Statistics, 31/12/2023.

  • 19

    Source : Bloomberg, 31/12/2023. Résultats basés sur les rendements de l’indice S&P 500.