Marchés et économie

Alors que les économies mondiales divergent, où se trouvent les occasions de placement?

Aerial of Arch of Triumph and Place Charles de Gaulle in Paris, France.
Points importants à retenir
Taux d’intérêt
1

Alors que la Banque du Canada et la Banque centrale européenne ont réduit les taux d’intérêt en juin, la Réserve fédérale a décidé de les maintenir.

Situation politique
2

Si l’Union européenne (UE) est plongée dans l’incertitude politique, le Royaume-Uni penche vraisemblablement vers la certitude politique en prévision de l’élection du 4 juillet.

Surprises électorales
3

Au cours des dernières semaines, nous avons eu droit à des surprises électorales au Mexique, en Afrique du Sud et en Inde.

La semaine dernière, nous avons publié nos perspectives de placement de mi-année, avec un thème dominant : trouver des occasions dans un contexte de divergence. Les économies développées occidentales évoluent toutes dans la même direction – généralement vers une baisse de l’inflation et près du début des réductions de taux – mais à des vitesses différentes. Cette divergence est en grande partie attribuable à la façon dont chaque grande économie a réagi à la pandémie, les États-Unis ayant mené le bal en matière de mesures de relance, et à la rapidité avec laquelle chaque économie a réagi à la poussée de l’inflation qui en a résulté. Cela est suffisant pour créer des divergences importantes qui se manifestent actuellement dans la rapidité avec laquelle les banques centrales commencent à réduire les taux.

Les États-Unis à l’aise de maintenir les taux à la hausse plus longtemps

La semaine dernière, la Réserve fédérale américaine (Fed) a décidé de maintenir les taux d’intérêt à leur niveau actuel et a laissé entendre qu’elle était à l’aise de les maintenir à des niveaux élevés aussi longtemps qu’il le faudra pour avoir l’assurance qu’il n’y aura pas de résurgence de l’inflation. Le graphique à points publié la semaine dernière nous en dit long sur le processus de réflexion de la Fed, les prévisions médianes de baisses de taux cette année étant tombées à un. La révision à la hausse de l’indice de base des dépenses personnelles de consommation a été tout aussi intéressante, la prévision médiane de fin d’année passant de 2,6 % à 2,8 % (elle n’était que de 2,4 % dans le graphique à points de décembre 2023).

Lors de sa conférence de presse qui a suivi cette rencontre, le président de la Fed, Jay Powell, a décrit l’économie américaine de la façon suivante : « […] la situation globale est celle d’un marché de l’emploi vigoureux, qui ralentit graduellement et qui rééquilibre tranquillement le marché de l’emploi. » En d’autres mots, les États-Unis se positionnent du côté lent des plans divergents de réductions de taux.

L’Europe réduit ses taux, tandis que la divergence régionale s’accentue

En revanche, au cours des deux dernières semaines seulement, la Banque du Canada et la Banque centrale européenne (BCE) ont amorcé des baisses de taux, satisfaites des progrès désinflationnistes. Toutefois, la BCE a laissé entendre que son rythme sera lent et que le calendrier des réductions supplémentaires dépendra fortement des données.

Les marchés européens sont très divergents en ce moment. Par exemple, l’écart entre les obligations d’État de la France à 10 ans et celles de l’Allemagne à 10 ans s’est considérablement élargi récemment, atteignant 80 points de base le 14 juin, son plus haut niveau en plus de 10 ans1. Depuis le début de juin, l’indice MSCI France a inscrit un rendement nettement inférieur à celui de l’indice MSCI Europe2.

Cette divergence est en grande partie attribuable à l’incertitude politique en France, exacerbée par la récente dégradation de la dette souveraine française par S&P en raison des préoccupations à l’égard du déficit du pays.

Le président français Emmanuel Macron a déclenché des élections parlementaires éclair juste après que les partis politiques d’extrême droite ont obtenu de très bons résultats aux élections du Parlement européen. Il a expliqué sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale et de déclencher des élections françaises : « La montée des nationalistes, des démagogues, est un danger pour notre nation, mais aussi pour notre Europe. Je ne saurais donc, à l’issue de cette journée, faire comme si de rien n’était3. »

Il existe un risque d’instabilité politique importante étant donné l’impopularité du parti politique centriste d’Emmanuel Macron. Marine Le Pen, chef du parti d’extrême droite Rassemblement national, a tenté d’apaiser les inquiétudes en déclarant qu’elle ne demanderait pas la démission de Macron si son parti l’emportait4. Cela devrait donner l’espoir que, si son parti obtient le pouvoir, elle pourrait bien faire comme Giorgia Meloni en Italie qui, après avoir suscité des inquiétudes lors de son élection à titre de première ministre, a causé la surprise positive avec un gouvernement de centre droit.

Toutefois, l’incertitude politique actuelle présente des risques que les réformes de l’Union européenne, comme la création d’une union des marchés financiers, soient plus difficiles à réaliser. De plus, les projets d’augmentation des dépenses budgétaires, conjugués à l’opposition nationaliste à la charte de l’Union européenne qui promet une « union plus étroite », pourraient empêcher la réalisation d’une union budgétaire pour l’UE. Tous ces facteurs pourraient freiner l’innovation, la concurrence, la productivité, l’échelle et la croissance en minant le marché unique de l’UE. Cela dit, il pourrait s’agir d’une occasion d’achat intéressante pour les actions européennes si les marchés tiennent compte de ces risques, même si les actions britanniques nous semblent plus intéressantes maintenant.

Au Royaume-Uni, la situation politique semble plus certaine à l’approche des élections

Le Royaume-Uni est dans une situation très différente de l’UE. Si l’Union européenne est plongée dans l’incertitude politique, le Royaume-Uni penche vraisemblablement vers la certitude politique, le parti travailliste ayant largement mené le bal dans les sondages en prévision des élections du 4 juillet. Il semble déjà clair que Keir Starmer sera le prochain premier ministre et que le Royaume-Uni deviendra un gouvernement de centre gauche. Selon nous, les actions britanniques, comme les actions européennes, présentent des valorisations intéressantes, mais ne comportent pas de risques d’instabilité politique à court terme.

Le Japon et la Chine maintiennent leurs taux

À sa réunion de juin, la Banque du Japon a décidé de maintenir les taux à leurs niveaux actuels, mais elle prévoit aussi de commencer à réduire ses achats d’obligations sous peu. Elle tire parti des réformes structurelles qui ont contribué à la normalisation de son économie, ce qui lui permet de commencer à normaliser sa politique monétaire.

Son voisin, la Chine, se trouve dans une situation quelque peu différente. Nous observons une reprise soutenue de la demande intérieure, le mois de mai étant le quatrième mois consécutif d’inflation des prix à la consommation en Chine. Les ventes au détail les plus récentes ont été encourageantes, tandis que la production industrielle a été soutenue; toutefois, le secteur immobilier continue d’être une source de préoccupation. Lors de sa réunion de juin, la Banque populaire de Chine a décidé de maintenir les taux à leurs niveaux actuels, probablement parce que les désavantages l’emportent sur les avantages d’une baisse de taux en ce moment.

Divergences entre les marchés émergents

Nous observons également des divergences dans les élections sur les marchés émergents. Au cours des dernières semaines, nous avons eu droit à des surprises électorales au Mexique, en Afrique du Sud et en Inde. Les électeurs sud-africains et indiens ont manifesté un soutien moindre à l’égard de leurs dirigeants sortants, tandis que les électeurs mexicains ont manifesté un soutien accru à l’égard du leur.

En Afrique du Sud, il semble que le gouvernement sortant du Congrès national africain (CNA) dirigé par Cyril Ramaphosa a réussi, après avoir perdu un appui important, à former une coalition centralisatrice, qui comprend la reconduction de son mandat. Cette situation semble plus attrayante pour les marchés qu’une unité complexe ou une coalition de gauche incluant le parti Combattants pour la liberté économique. Ce résultat est synonyme de stabilité, ce qui est évidemment important pour les investisseurs.

En Inde, la perte inattendue de sièges par le premier ministre Narendra Modi a provoqué une réaction initiale négative des marchés, compte tenu de sa popularité et des attentes qu’il puisse gagner plus de sièges. Depuis, M. Modi a formé une coalition qui lui permettra de continuer à dominer la scène politique indienne. Il a conservé les quatre principaux ministères et ministres (Finances, Extérieur, Intérieur, Défense) tout en élargissant son cabinet à 72 membres afin d’inclure des partenaires de coalition. Selon moi, il s’agit d’un résultat positif qui a été bien accueilli par les marchés et qui devrait continuer de l’être.

La réaction la plus négative des marchés est celle qui a suivi le résultat des élections mexicaines. On craint que l’administration de Claudia Sheinbaum, en raison de ses solides résultats aux sondages, n’ait reçu le mandat de déplacer le pays vers la gauche. Toutefois, cela risque d’être limité. Rogelio Ramirez de la O, ministre des Finances respecté et ferme, devrait conserver son poste, ce qui devrait signaler une stabilité macroéconomique aux investisseurs.

Selon nous, les marchés indiens sont les plus attrayants parmi ces trois pays, mais les obligations indiennes sont plus intéressantes que les actions en raison des évaluations boursières élevées. Le redressement de l’Afrique du Sud est plus prometteur. À l’heure actuelle, les investisseurs sont sceptiques à l’égard du Mexique; ils auront probablement besoin de voir des politiques qui ne sont pas perçues comme étant trop à gauche pour accroître leur confiance à l’égard des actifs mexicains.

Ce que nous surveillons cette semaine

Cette semaine, nous serons impatients de prendre connaissance du rapport sur les ventes au détail aux États-Unis, étant donné les opinions divergentes à l’égard de la vigueur de la consommation de ce pays (et du rapport révélant une faiblesse confiance des consommateurs la semaine dernière). Nous obtiendrons également des données sur l’inflation dans la zone euro et au Royaume-Uni ainsi que des données sur l’indice des directeurs d’achats. Il est également probable que la divergence entre les banques centrales s’accentue cette semaine. Aux réunions de la Banque d’Angleterre et de la Banque de réserve d’Australie, les taux devraient demeurer inchangés, tandis que la Banque nationale suisse devrait réduire ses taux à sa réunion de cette semaine.

Grâce aux contributions d’Arnab Das

Dates à surveiller

Date

Événement

Ce que cela nous indique

17 juin

Allocution du président Lagarde de la Banque centrale européenne

Donne de plus amples renseignements sur le processus décisionnel de la banque centrale.

 

Mises en chantier au Canada

Indique la santé du marché de l’habitation.

 

Empire State Manufacturing Index

Sondage mené par la Federal Reserve Bank of New York auprès de fabricants de l’État de New York.

18 juin

Décision de la Banque de réserve d’Australie

Présentation de la plus récente décision sur la trajectoire des taux d’intérêt.

 

Indice de sentiment économique ZEW d’Allemagne

Mesure le sentiment économique de l’Allemagne pour les six prochains mois.

 

Indice des prix à la consommation de la zone euro

Fait le suivi de la trajectoire de l’inflation.

 

Ventes au détail aux États-Unis

Indique la santé du secteur du commerce de détail.

 

Production industrielle américaine

Indique la santé du secteur industriel.

 

Compte rendu de la réunion sur la politique monétaire de la Banque du Japon

Donne de plus amples renseignements sur le processus décisionnel de la Banque centrale.

19 juin

Indice des prix à la consommation au Royaume-Uni

Fait le suivi de la trajectoire de l’inflation.

 

Indice des prix à la production au Royaume-Uni

Fait le suivi de la trajectoire de l’inflation.

 

Décision de la Banque du Brésil

Présentation de la plus récente décision sur la trajectoire des taux d’intérêt.

20 juin

Décision de la Banque nationale suisse

Présentation de la plus récente décision sur la trajectoire des taux d’intérêt.

 

Décision de la Banque d’Angleterre

Présentation de la plus récente décision sur la trajectoire des taux d’intérêt.

           

Bulletin économique de la BCE

Présente l’information économique et monétaire qui constitue la base des décisions politiques.

 

Confiance des consommateurs dans la zone euro

Mesure la confiance des consommateurs dans la zone euro.

 

Indice des directeurs d’achats du Japon

Indique la santé économique des secteurs de la fabrication et des services.

 

Indice des prix à la consommation au Japon

Fait le suivi de la trajectoire de l’inflation.

21 juin

Ventes au détail au Royaume-Uni

Indique la santé du secteur du commerce de détail.

 

Indices des directeurs d’achats de la zone euro

Indique la santé économique des secteurs de la fabrication et des services.

 

Indices des directeurs d’achats du Royaume-Uni

Indique la santé économique des secteurs de la fabrication et des services.

 

Ventes au détail au Canada

Indique la santé du secteur du commerce de détail.

 

Indices des directeurs d’achats des États-Unis

Indique la santé économique des secteurs de la fabrication et des services.

Notes de bas de page

  • 1

    Source : Bloomberg, au 14 juin 2024.

  • 2

    Source : Indice MSCI. Du 1er juin 2024 au 14 juin 2024, l’indice MSCI France a enregistré un rendement de -7,53 % et l’indice MSCI Europe, un rendement de -2,69 %.

  • 3

    Source : « Macron calls new French legislative elections », The New York Times, 9 juin 2024. 

  • 4

    Source : « France’s Le Pen says she won’t seek Macron’s resignation if far right wins snap election », Politico, 16 juin 2024.