Marchés et économie L’instabilité géopolitique se poursuit à l’aube de la nouvelle année
Dans le monde entier, les marchés ont gagné du terrain l’an dernier, malgré l’incertitude géopolitique, une tendance qui, selon moi, devrait se poursuivre.
À mon avis, les propos du président du conseil de la Réserve fédérale américaine la semaine dernière étaient purement performatifs et ne changent rien à mes perspectives.
Les banques centrales veillent à ce que les anticipations d'inflation à plus long terme (plutôt que celles à court terme) soient « bien ancrées ».
Après la décote de S&P en 2011, les marchés semblent désensibilisés aux avertissements et aux décotes de la dette américaine.
La semaine dernière, trois événements intéressants ont attisé l’incertitude des investisseurs : les taux des obligations américaines à long terme ont augmenté de manière significative par suite de l’adjudication décevante des effets du Trésor américain à 30 ans1 et des propos bellicistes du président du conseil de la Réserve fédérale américaine, Jay Powell, qui a affirmé que les autorités monétaires ne sont pas encore prêtes à déclarer la fin du resserrement de la politique monétaire. De plus, des sondages ont révélé que les anticipations d’inflation des consommateurs de la zone euro et des États-Unis ont augmenté. Enfin, vendredi dernier, à quelques jours d'une possible paralysie des services publics américains, Moody's a annoncé que ses perspectives à l’égard de la dette américaine sont passées de neutres à négatives et a menacé d'abaisser la cote de crédit des États-Unis. Tout cela est effectivement très intéressant, mais je ne crois pas que ce soit très pertinent pour les marchés et voici pourquoi.
Je m’attendais à ce que les dirigeants du Federal Open Market Committee (FOMC) reviennent à un « Fedspeak » belliciste si les marchés se montraient trop enthousiastes. Pour citer la reine Gertrude dans Hamlet de Shakespeare, je crois que M. Powell « proteste trop ». À mon avis, ses propos de la semaine dernière étaient purement performatifs et avaient pour but de stabiliser les conditions financières; ils n’ont rien changé à mes perspectives.
Il en va de même d’autres propos bellicistes tenus récemment par la Fed, comme l’avertissement récent de Neel Kashkari, gouverneur de la Réserve fédérale de Minneapolis, qui a dit : « Nous n’avons pas complètement résolu le problème de l’inflation. Nous avons encore du pain sur la planche pour en arriver là »2, ce qui est tout à fait normal, puisque les marchés ont commencé à se réjouir un peu trop tôt au goût de la Fed.
En ce qui concerne les anticipations d’inflation des consommateurs, le plus récent sondage de la zone euro a révélé un pic des anticipations d’inflation sur un an. Le plus récent sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs a aussi signalé un pic des anticipations d’inflation sur un an aux États-Unis. Cependant, il est important de noter que les anticipations d’inflation à court terme sont habituellement plus volatiles et souvent influencées par les prix de l’énergie.
Le printemps dernier, nous avions observé un pic similaire des anticipations d’inflation sur un an des consommateurs des États-Unis et de la zone euro, qui a coïncidé avec une hausse marquée des prix du pétrole brut. Je crois que le pic actuel sera relativement bref, étant donné que les prix du pétrole ont chuté considérablement ces dernières semaines.
Il est vrai que les banques centrales surveillent de près les anticipations d’inflation, mais elles veillent surtout à ce que les anticipations à long terme (plutôt que celles à court terme, en l’occurrence sur un an) soient « bien ancrées ». Le sondage de l’Université du Michigan sur les anticipations d’inflation à plus long terme des consommateurs américains a révélé une plus faible augmentation, mais cette augmentation n'a pas été constatée dans le sondage de la Réserve fédérale de New York sur les attentes des consommateurs. En fait, les résultats du plus récent sondage, qui ont été dévoilés le 13 novembre, montrent une légère baisse de la médiane des anticipations d’inflation sur cinq ans. En passant, le sondage de la Réserve fédérale de New York montre aussi une diminution des anticipations d’inflation sur un an, qui reflète peut-être déjà la récente chute des prix du pétrole.
Lorsque Moody’s a abaissé ses perspectives sur la dette américaine la semaine dernière, elle a évoqué la tempête parfaite des taux d’intérêt plus élevés et « l’absence d’une politique budgétaire efficace pour réduire les dépenses publiques ou augmenter les recettes fiscales ».2 Le moment choisi pour l’annonce, à quelques jours d’une possible paralysie des services publics, ne semble pas être une coïncidence. Moody’s a expliqué que « la polarisation politique qui perdure au Congrès américain accroît le risque que les gouvernements subséquents ne parviennent pas à un consensus sur un plan budgétaire à adopter pour ralentir l’augmentation du fardeau de la dette ».3
Toutefois, même si Moody’s procède à une décote, je doute que cela ait un impact significatif sur les marchés. N'oublions pas que « nous avons déjà vécu une situation semblable ». À l’été 2011, S&P a émis un avertissement, puis a abaissé la cote de crédit des États-Unis. Cet avertissement a provoqué un choc et les marchés ont réagi violemment, mais depuis, les marchés semblent désensibilisés aux avertissements et aux décotes. En mai 2023, Fitch a mis la cote de crédit des États-Unis sous surveillance en raison de l’impasse sur le plafond de la dette. Puis, au début du mois d’août, elle a abaissé la cote de crédit des États-Unis, ce à quoi les marchés ont très peu réagi. Je crois que les marchés réagiront de la même manière si Moody’s décide d’abaisser la cote de crédit des États-Unis.
En réalité, ce serait en demander beaucoup aux États-Unis de devenir moins dysfonctionnels et plus responsables sur le plan budgétaire. Comme nous l’avons appris avec la création de la Commission nationale Simpson-Bowles sur la responsabilité budgétaire et la réforme fiscale en 2010 (effort bipartisan pour réduire le déficit), presque tous les postes de dépenses du gouvernement fédéral sont considérés comme intouchables par l’un ou l’autre camp et le climat politique est beaucoup plus polarisé aujourd’hui
La bonne nouvelle est qu’il n’y a pas un mais deux leviers à actionner pour atténuer les problèmes de dette des États-Unis. L’un d’eux, celui des taux d’intérêt, est plus facile à actionner que l’autre, en l’occurrence, la réduction du déficit budgétaire. Même si j’espère que les législateurs américains pourront coopérer pour réduire le déficit budgétaire à plus long terme, je suis réaliste : les baisses de taux auront un effet beaucoup plus rapide et seront plus efficaces à court terme. J’espère que la Fed commencera à baisser ses taux plus tôt que tard en 2024.
Cette semaine, l’attention se déplacera des dirigeants des banques centrales vers les politiciens, en particulier aux États-Unis. Cela pourrait entraîner une certaine volatilité à court terme car, comme le disait Otto von Bismarck en 1863 : « la politique n’est pas une science exacte ». Inutile de préciser qu’il s’agit là d’un véritable euphémisme.
Cela étant dit, il n’y aura pas que des événements politiques et géopolitiques la semaine prochaine. L’indice des prix à la consommation (et des prix à la production) américain sera rendu public et c’est une donnée importante que la Fed va analyser à sa réunion de décembre. J’aimerais profiter de l’occasion pour rappeler que tous les points de données ne soutiendront pas parfaitement la thèse de la désinflation. Malgré tout, je crois fermement que la désinflation est bel et bien amorcée.
Date |
Rapport/événement |
Ce qu'il nous dit |
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14 novembre |
Chômage au Royaume-Uni
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Donne une indication de la santé du marché du travail. |
14 novembre |
Indice ZEW de confiance économique de l’Allemagne |
Sonde l’opinion des répondants à l’égard de l'orientation de l'économie pour les six prochains mois.
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14 novembre |
Données sur l’emploi dans la zone euro |
Donne une indication de la santé du marché du travail.
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14 novembre |
Produit intérieur brut de la zone euro |
Mesure l’activité économique d’une région.
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14 novembre |
Indice ZEW de confiance économique de la zone euro |
Sonde l’opinion des répondants à l’égard de l'orientation de l'économie pour les six prochains mois.
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14 novembre |
Indice NFIB de confiance des petites entreprises américaines
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Mesure le degré d'optimisme ou de pessimisme des propriétaires de petites entreprises à l'égard d'une série d'indicateurs économiques et commerciaux.
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14 novembre |
Indice des prix à la consommation américain
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Suit la trajectoire de l'inflation.
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15 novembre |
Produit intérieur brut du Japon
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Mesure l’activité économique d’une région.
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15 novembre |
Production industrielle de la Chine
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Donne une indication de la santé économique du secteur de l’industrie.
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15 novembre |
Ventes au détail de la Chine |
Sonde la demande des consommateurs.
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15 novembre |
Taux de chômage de la Chine |
Donne une indication de la santé du marché du travail.
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15 novembre |
Production industrielle du Japon
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Donne une indication de la santé économique du secteur de l’industrie.
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15 novembre |
Indice des prix à la consommation du Royaume-Uni |
Suit la trajectoire de l'inflation.
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15 novembre |
Production industrielle de la zone euro
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Donne une indication de la santé économique du secteur de l’industrie.
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15 novembre |
Indice des prix à la production des États-Unis
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Mesure l'évolution des prix payés aux producteurs de biens et de services.
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15 novembre |
Ventes au détail des États-Unis
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Sonde la demande des consommateurs.
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16 novembre |
Production industrielle des États-Unis
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Donne une indication de la santé économique du secteur de l’industrie.
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16 novembre |
Ventes au détail du Royaume-Uni
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Sonde la demande des consommateurs.
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16 novembre |
Indice des prix à la consommation de la zone euro
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Suit la trajectoire de l'inflation.
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16 novembre |
Mises en chantier et valeur des permis de construction aux États‑Unis |
Donne une indication de la santé du marché de l’habitation. |
18 novembre |
Second tour des élections présidentielles en Argentine |
Les électeurs vont choisir entre les deux premiers candidats. |
Source: Bloomberg
Source : Reuters, « Kashkari: Fed has more work to do to control inflation », 6 novembre 2023
Source: Moody’s
Dans le monde entier, les marchés ont gagné du terrain l’an dernier, malgré l’incertitude géopolitique, une tendance qui, selon moi, devrait se poursuivre.
La tendance croissante au conservatisme budgétaire, l’importance soutenue de la politique monétaire, l’intensification des risques géopolitiques et l’innovation technologique pourraient dicter l’orientation des marchés mondiaux au cours de la nouvelle année.
La déréglementation et les baisses d’impôt pourraient stimuler la croissance de l’économie et du marché américains, tandis que les droits de douane et les restrictions en matière d’immigration pourraient poser des défis.
Renseignements importants
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Image d’en-tête du blogue : Philip Yabut / Getty
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Il ne s’agit pas d’une recommandation d’une stratégie de placement ou d’un produit pour un investisseur en particulier. Les investisseurs devraient toujours consulter leur conseiller financier avant de prendre des décisions de placement.
Tous les placements comportent des risques, y compris le risque de perte.
En règle générale, les cours des actions fluctuent, parfois même considérablement, en réaction aux activités de la société émettrice, ainsi qu’à la conjoncture des marchés en général, à la situation économique et au climat politique.
Les titres à revenu fixe sont exposés au risque de crédit de l’émetteur et aux retombées des fluctuations de taux d’intérêt. De manière générale, les cours des obligations baissent lorsque les taux d’intérêt augmentent, et vice versa; c’est ce que l’on appelle le risque de taux d’intérêt. Un émetteur peut se retrouver dans l’incapacité de payer les intérêts ou de rembourser le capital, ce qui entraîne une baisse de la valeur de ses titres et de sa cote de crédit.
Les produits alternatifs détiennent normalement des placements moins traditionnels et utilisent des stratégies de négociation plus complexes, y compris la couverture et l’effet de levier par l’entremise d’instruments dérivés, de ventes à découvert et de stratégies opportunistes qui changent en fonction des conditions boursières. Les investisseurs qui envisagent les produits alternatifs doivent se renseigner sur leurs caractéristiques uniques et sur les risques additionnels auxquels les stratégies utilisées les exposent. Comme pour tous les placements, les rendements fluctueront. Il est possible de perdre de l’argent.
Les risques d’investir dans des titres d’émetteurs étrangers peuvent inclure la fluctuation des devises étrangères, l’instabilité politique et économique et les problèmes liés à l’imposition étrangère.
Les cotes de crédit sont attribuées par des organismes nationalement reconnus de notation statistique (Nationally Recognized Statistical Rating Organizations ou NRSRO) sur la base de l'évaluation de la solvabilité des émetteurs des obligations. Les cotes vont de AAA (la plus élevée) à D (la plus basse) et peuvent changer. La mention « non cotée » indique seulement que le débiteur n’a pas été coté; elle ne devrait pas être considérée comme une indication qu’il s’agit d’un titre de qualité inférieure. Les contrats à terme et autres instruments dérivés ne peuvent pas se faire attribuer une cote de crédit par les NRSRO et sont exclus des attributions de qualité. Pour en savoir davantage sur la méthodologie de notation, visitez le site web des NRSRO : standardandpoors.com à la rubrique « Understanding Ratings » sous Rating Resources et moodys.com à la rubrique « Rating Methodologies » sous Research and Ratings.
La désinflation, ralentissement du taux d'inflation des prix, désigne les situations où le taux d'inflation a légèrement diminué à court terme.
L'inflation est le taux auquel le niveau général des prix des biens et services augmente.
L’inflation de base correspond à la variation des coûts des biens et services, mais exclut les secteurs des aliments et de l’énergie.
L'inflation globale correspond à l'inflation totale dans une économie, y compris les aliments et l'énergie.
L'indice des prix à la consommation (IPC) mesure la variation des prix à la consommation et est compilé par le US Bureau of Labor Statistics.
Un point de base représente un centième d’un point de pourcentage.
Le Federal Open Market Committee (FOMC) est un comité du conseil d’administration de la Fed composé de 12 membres qui se réunissent régulièrement pour établir la politique monétaire, y compris les taux d’intérêt perçus des banques.
Le terme « accommodante » désigne une perspective économique qui soutient généralement des taux d'intérêt bas afin de stimuler la croissance économique.
La Banque centrale européenne (BCE) est chargée de la politique monétaire de l’Union européenne.
La zone euro (parfois appelée euroland) est une union économique et monétaire qui regroupe les États membres de l'Union européenne qui ont adopté l'euro comme devise commune.
Le PIB (produit intérieur brut) est un indicateur généralisé de l’activité économique d’une région qui mesure la valeur monétaire de tous les produits finis et services produits dans cette région au cours d’une période donnée.
Le terme « belliciste » décrit les autorités monétaires qui favorisent les hausses de taux d’intérêt comme stratégie pour maîtriser l’inflation.
L'enquête auprès des consommateurs est un sondage téléphonique mensuel effectué par l'Université du Michigan qui donne les indices de confiance des consommateurs et d’anticipations d’inflation.
Les banques centrales peuvent resserrer leur politique monétaire pour contenir l'inflation.
La courbe des taux illustre les taux d’intérêt, à un moment précis, de différentes obligations ayant la même cote de solvabilité, mais différentes dates d’échéance et sert à projeter les variations des taux d’intérêt et l’évolution de l’activité économique.
Les opinions exprimées ci-dessus sont celles de l’auteure au 13 novembre 2023. Ces commentaires ne doivent pas être interprétés comme des recommandations, mais comme une illustration des grands thèmes. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement. Ils comportent des risques et des incertitudes et sont fondés sur des hypothèses; nous ne pouvons pas vous garantir que les résultats réels ne différeront pas considérablement de nos attentes.
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