Marchés et économie

La « pause conditionnelle » de la Fed semble avoir débuté

La « pause conditionnelle » de la Fed semble avoir débuté
Points importants à retenir
Une hausse de taux.
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La Réserve fédérale américaine a décidé à l’unanimité de relever ses taux de 25 points de base à sa réunion de mai.

Une « pause conditionnelle »
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Quoi qu’en dise le président du conseil de la Fed, à mon avis, cela ressemble à une « pause conditionnelle » de facto.

Forte volatilité.
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Nous anticipons une forte volatilité des marchés à court terme, car les données seront examinées encore plus attentivement à partir de maintenant.

La Réserve fédérale américaine (Fed) a décidé à l’unanimité de relever ses taux de 25 points de base. Je tiens à dire que je crois que cela ressemble à une « pause conditionnelle » de facto, même si le président du conseil de la Fed, Jay Powell, a insisté pour dire ceci : « nous n’avons pas encore décidé de marquer une pause ». Voici pourquoi :

  • La Fed a supprimé l’énoncé suivant de sa déclaration : « le Comité croit qu'il faudra peut-être resserrer davantage la politique monétaire » et l'a remplacé par ceci : « l’ampleur du resserrement dépendra des statistiques économiques ». Ça change la donne pour les prochaines hausses de taux.
  • Le ton de la Fed me rappelle celui qu’elle a utilisé lorsqu’elle a appuyé sur le bouton pause en 2006. La déclaration du Federal Open Market Committee (FOMC) d’août 2006 disait ceci : « L’ampleur et le moment du prochain resserrement qui pourrait s’avérer nécessaire pour gérer ces risques dépendront de l’évolution des perspectives d’inflation et de croissance économique, à la lumière des statistiques économiques ».
  • Le ton de la Fed et les commentaires formulés par M. Powell aujourd’hui à sa conférence de presse ressemblent aussi à ce que la Banque du Canada disait à propos de la nécessité de se fier aux statistiques économiques lorsqu’elle a annoncé une « pause conditionnelle » en janvier. Voici ce que la Banque du Canada avait dit à ce moment-là : « Après la modeste hausse d’aujourd’hui, nous nous attendons à pouvoir mettre en pause les augmentations du taux directeur pendant que nous évaluerons les effets du resserrement monétaire considérable auquel nous avons déjà procédé. Pour être clair, il s'agit d'une pause conditionnelle — elle est conditionnelle à ce que les développements économiques évoluent globalement conformément à nos perspectives (Rapport sur la politique monétaire). Si nous devons intervenir davantage pour ramener l’inflation à la cible de 2 %, nous le ferons. »

De plus, la Fed n'a pas modifié sa politique de resserrement quantitatif.

Les marchés boursiers se sont repliés lorsqu’on a appris que la volatilité risque d’augmenter

Les marchés boursiers se sont repliés et les titres de valeur ont chuté plus que les titres de croissance. L’indice Russell 2000 croissance a terminé la séance en légère hausse.  Le prix de l'or a augmenté, tout comme l’indice VIX.  Les taux des bons du Trésor américain ont baissé. L’indice KBW Regional Banking a encore chuté aujourd'hui, mais a connu un léger rebond en fin de séance.1

Nous anticipons une forte volatilité des marchés à court terme, car les données seront examinées encore plus attentivement à partir de maintenant pour voir s’il y a lieu de procéder à de nouvelles hausses de taux. Mais l’élément à retenir, à mon avis, est que la fin du cycle de hausses des taux est très proche. Cela devrait ouvrir la voie à des conditions plus favorables aux actifs à risque, comme les actions. Dans l’ensemble, les actions ont tendance à bien se comporter au cours de la période de un à deux ans après des hausses de taux, sauf en 2000.2

Compte tenu de nos attentes en matière de volatilité à court terme, exacerbées par l’incertitude entourant la politique de la Fed, les inquiétudes liées au plafond de la dette publique aux États-Unis et la crainte que d’autres banques régionales s’effondrent, je privilégierais un positionnement défensif du portefeuille. Cependant, les investisseurs devraient retrouver l’appétit pour le risque une fois ces problèmes résolus. 

Quels sont les risques qui retiennent notre attention?  

Il y a le risque que cette hausse de taux et le maintien du resserrement quantitatif exercent des pressions additionnelles sur certaines banques. 

Il se peut qu’une fois que les effets cumulatifs du resserrement de la politique monétaire se feront pleinement sentir dans l’économie, ils soient suffisamment marqués pour provoquer une profonde récession.

Il se peut aussi que les prochaines statistiques pointent vers une inflation élevée et persistante, ce qui inciterait probablement la Fed à procéder à d’autres hausses de taux.

Il convient de noter que la tension entre le risque d’une inflation de base persistante et le risque opposé de pressions restrictives cumulées provoquées par les hausses de taux et le resserrement quantitatif pourrait inciter la Fed à prolonger sa pause conditionnelle avec un biais neutre pendant un certain temps. Cela risquerait, par le fait même, de prolonger la période d’incertitude à l’égard de la politique monétaire et de la volatilité des marchés, en attendant que la situation se précise concernant les tensions bancaires et la vitesse et l’ampleur de la phase de désinflation.

Nous allons surveiller de près la situation des banques régionales, les statistiques économiques et les données sur l’inflation.

Rédigé en collaboration avec Paul Jackson, Adam Burton, Arnab Das et Brian Levitt

Notes de bas de page

  • Citations des dirigeants des banques centrales, en l’occurrence la Réserve fédérale américaine et la Banque du Canada.

  • 1

    Source des déclarations de rendement de ce paragraphe : Bloomberg, L.P., 3 mai 2023. Les titres de valeur sont représentés par l’indice Russell 3000 des titres de valeur. Les titres de croissance sont représentés par l’indice Russell 3000 des titres de croissance.

  • 2

    Sources : U.S. Bureau of Labor Statistics et Bloomberg, L.P., 3 mai 2023, représenté par l'indice S&P 500 sur les périodes de 1 et 2 ans qui ont suivi les pics d'inflation de février 1970, de décembre 1974, de mars 1980, de décembre 1990 et de juillet 2008.