Marchés et économie

Qu'est-ce qui fait bouger les marchés? Les consommateurs, l'inflation et les banques centrales

Une femme dans la trentaine achète des jeans dans un magasin de vêtements.
Points importants à retenir
Consommateurs américains
1

En décembre, les ventes au détail ont été supérieures aux prévisions et les premières inscriptions à l’assurance-chômage ont atteint leur plus bas niveau depuis septembre 2022.

Croissance en Chine
2

La croissance annuelle du produit intérieur brut de la Chine a augmenté au quatrième trimestre et dépassé la cible des autorités monétaires.

Dirigeants de banques centrales
3

Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, et Chris Waller, gouverneur de la Réserve fédérale américaine, ont jeté une douche froide à ceux qui espéraient une baisse rapide des taux d'intérêt. 

Chaque semaine nous offre une mosaïque de statistiques économiques et de données sur les marchés. Parmi les statistiques et données rendues publiques la semaine dernière, on trouve les ventes au détail et les inscriptions à l’assurance-chômage aux États-Unis, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de la Chine, l’inflation au Royaume-Uni et dans la zone euro, ainsi que des opinions des dirigeants de certaines banques centrales. Voici comment ces points de données contribuent à la vue d’ensemble et nous aident à savoir ce qui fait bouger les marchés.

Les consommateurs américains semblent être en assez bonne santé financière

En décembre, les ventes au détail ont été supérieures aux prévisions et les premières inscriptions à l’assurance-chômage ont atteint leur plus bas niveau depuis septembre 20221, deux signes encourageants pour la santé financière des consommateurs américains. De plus, nous voyons enfin des signes qui montrent que les consommateurs américains se sentent bien eux-mêmes, si l’on se fie à l'indice de confiance des consommateurs de l'Université du Michigan, qui a atteint son plus haut niveau depuis juillet 2021.2 L'amélioration observée au cours des deux derniers mois est considérable.

En Chine, la croissance s'améliore mais n’est pas constante

La croissance annuelle du PIB de la Chine a augmenté au quatrième trimestre, pour atteindre le taux annualisé de 5,2 %, ce qui est supérieur à la cible de 5 % établie par les autorités monétaires, mais légèrement inférieur à l'estimation consensuelle de 5,3 %.3 Les autorités monétaires vont probablement fixer une cible de croissance de 5 % pour 2024, qui semble désormais réalisable sans un assouplissement significatif. En outre, la production industrielle (6,8 %), les ventes au détail (7,4 %) et les dépenses en immobilisations (3 %) ont augmenté sur douze mois.3

Certains craignent que ces meilleurs résultats mettent un frein à toute mesure de relance supplémentaire, mais j'en doute. Il semblerait que la Chine envisage d'émettre des obligations souveraines spéciales, ce qui ne s'est produit que trois fois auparavant.4 Je m'attends à des mesures de relance ciblées dans des secteurs tels que l’immobilier, étant donné que les investissements immobiliers en Chine ont chuté de 9,6 % en 2023.3

L'inflation semble bien maîtrisée

Certaines données relatives à l'inflation ont effrayé les marchés, mais la réalité est que l'inflation reste bien maîtrisée et qu'elle va probablement continuer de diminuer dans les pays développés :

  • Royaume-Uni. L'indice des prix à la consommation (IPC) de décembre au Royaume-Uni a été plus élevé que prévu (4,0 % contre 3,8 % en glissement annuel) et plus élevé qu'en novembre (3,9 %).5 Toutefois, cette hausse est en grande partie attribuable à l'augmentation des prix du tabac et de l'alcool. L'IPC de base (qui exclut l'énergie, les aliments, l'alcool et le tabac) a augmenté de 5,1 % sur douze mois, soit le même taux que le mois précédent.5 Cependant, un autre rapport nous apprend que la croissance des salaires (hors primes) a progressé à son rythme le plus faible depuis près de un an.6
  • Zone euro. Nous avons observé une tendance similaire dans la zone euro, où le taux d'inflation de décembre a augmenté de 2,9 % sur douze mois, en hausse par rapport aux 2,4 % enregistrés en novembre.7 Cependant, nous devons nous rappeler qu'il avait augmenté de 9,2 % sur douze mois un an plus tôt.7 Par ailleurs, l'inflation (excluant les aliments et l’énergie) a progressé de 3,9 % sur douze mois, en baisse par rapport à l’augmentation de 4,2 % enregistrée le mois précédent.7

Il est aussi important de tenir compte des attentes des consommateurs exprimées dans le cadre de sondages. Les attentes des consommateurs permettent de prédire l'inflation future, car elles influencent les décisions de consommation des ménages, si bien que les attentes ont tendance à se concrétiser. Comme l'a admis le président du conseil de la Réserve fédérale, Jay Powell : « les anticipations d'inflation sont terriblement importantes et nous passons beaucoup de temps à les surveiller ».8 On peut donc dire que les résultats récents sont encourageants :

  • États-Unis. Les anticipations d’inflation des consommateurs américains pour la prochaine année, telles que mesurées par le sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs, ont chuté de manière spectaculaire ces derniers mois, passant de 4,5 % en novembre à 2,9 % en janvier.9 En outre, le sondage de la Réserve fédérale d’Atlanta sur les anticipations d’inflation des entreprises a révélé que celles-ci s'attendent à une baisse substantielle de l'inflation au cours de l'année à venir, à 2,2 %, se rapprochant ainsi de la cible d'inflation de la Fed.10
  • Zone euro. Le sondage de la Banque centrale européenne (BCE) sur les attentes des consommateurs a montré que les attentes médianes des consommateurs en matière d’inflation dans la zone euro pour les douze prochains mois sont tombées à 3,2 % en novembre.11 Ce chiffre est nettement inférieur au taux de 4,0 % enregistré en octobre et est le taux le plus bas depuis février 2022.11

Au Japon, on observe également une baisse de l'inflation, même si ce n'est pas le but visé. Le taux d'inflation en glissement annuel s’élevait à 2,6 % en décembre, contre 2,8 % en novembre, avec une inflation de base de 3,7 %, par rapport à 3,8 % en novembre.12 Cela confirme notre prévision selon laquelle la Banque du Japon va laisser ses taux inchangés à sa réunion de cette semaine.

Les dirigeants des banques centrales gardent un ton belliciste

La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré qu’il ne faut pas s’attendre à des baisses de taux avant l'été, certes pas au printemps. De son côté, le gouverneur de la Fed, Chris Waller, a jeté une douche froide à ceux qui espéraient une baisse des taux dès le mois de mars : « Lorsque le moment sera venu de commencer à baisser les taux, je crois que cela pourra et devra se faire de manière méthodique et prudente... Je ne vois aucune raison d'agir aussi tôt ni de procéder à des baisses aussi rapides que par le passé ».13

Je tiens à souligner que je ne m'attendais pas à ce que la Fed procède à une baisse de taux en mars et que je m'attendais à ce que la BCE commence à abaisser ses taux après la Fed. Par conséquent, rien de ce qui a été dit ne modifie mes prévisions pour 2024. Encore une fois, je tiens à préciser que les dirigeants de banques centrales ont un objectif à l'esprit lorsqu'ils formulent ces commentaires; ils veulent garder le contrôle de l'assouplissement des conditions financières.

Un nouveau record pour l'indice S&P 500

La semaine dernière, l’indice S&P 500 a atteint un nouveau sommet record de 4 839 points et fracassé son précédent record de 4 796 points établi le 3 janvier 2022. Cependant, la corrélation que nous avons observée récemment entre la baisse des taux obligataires et la hausse des cours boursiers a été rompue, du moins temporairement. La semaine dernière, les marchés obligataires ont été extrêmement volatils, parce que les investisseurs craignent que l’inflation soit plus forte que prévu et s’inquiètent des propos bellicistes des dirigeants de banques centrales, ce qui a entraîné une hausse des taux obligataires.

Par exemple, en réaction aux données sur l'inflation dans la zone euro, les taux des obligations de la zone euro ont augmenté considérablement; le taux des obligations d’État allemandes à 10 ans est passé de 2,18 à 2,34 %.14 Après la publication des données sur les ventes au détail aux États-Unis, les taux obligataires américains ont eux aussi monté en flèche. Les taux obligataires ont aussi été propulsés par les propos bellicistes des dirigeants de banques centrales.

Mais cela n'a pas empêché les marchés boursiers d’enregistrer des gains. Le catalyseur a été l'enthousiasme suscité par le secteur des technologies de l’information. Tout a commencé dans le secteur des semi-conducteurs, avec des prévisions très positives de Taiwan Semiconductor, puis la tendance s'est étendue à l’ensemble des valeurs technologiques. Les moteurs de ces mouvements des marchés sont l'enthousiasme suscité par le potentiel de hausse des bénéfices dans le secteur des technologies de l’information et l'engouement pour le potentiel de l'intelligence artificielle. Cela a fait naître un sentiment plus haussier pour l'ensemble des marchés et a fait grimper les cours des actions dans plusieurs secteurs d’activité.

La prochaine semaine

La semaine prochaine sera riche en décisions des banques centrales, de la Banque du Japon à la Banque du Canada en passant par la BCE. Le rapport sur les dépenses de consommation personnelle, plus importante donnée pour la Fed en matière d'inflation, nous aidera à prévoir ce que la Fed pourrait nous dire à sa réunion qui se tiendra la semaine suivante.

Cela étant dit, ne laissons pas les arbres nous cacher la forêt. À mon avis, même si les données sur l'inflation sont imparfaites, en particulier celles sur l'inflation globale, il faut garder à l’esprit que la désinflation est en cours et qu’elle va se poursuivre. Peu importe que la Fed amorce ses baisses de taux en mars ou en mai, l’important, c’est qu’elle ira de l’avant et les réduira considérablement cette année, mais aussi que les autres grandes banques centrales occidentales lui emboîteront le pas. Je crois que nous nous dirigeons vers un atterrissage rapide, mais en dents de scie à court terme et que nous assisterons probablement à une réaccélération de la croissance économique plus tard cette année.

Je m'attends toujours à ce que les actions des sociétés à petite capitalisation, celles de l’extérieur des États-Unis et les valeurs technologiques se comportent bien au cours des prochains mois, en plus des obligations de qualité, pour ne citer que quelques domaines qui recèlent de bonnes occasions de placement. Quoi qu’il en soit, je crois qu’il est essentiel d’avoir un portefeuille bien diversifié entre et au sein des trois grandes catégories d’actifs, à savoir les actions, les obligations et les placements alternatifs. Cette nouvelle année d'investissement ne fait que commencer et devrait offrir quelques rebondissements et surprises en cours de route. 

Dates à surveiller

Date

Rapport

Ce qu'il nous dit

23 janvier

Décision de la Banque du Japon sur les taux d'intérêt et conférence de presse

Révèlent la plus récente décision concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

 

Enquête de la BCE sur le crédit bancaire

Nous renseigne sur l'offre et la demande de prêts aux entreprises et aux ménages.

 

Indices PMI S&P Global du Japon

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

24 janvier

Indices PMI S&P Global de la zone euro

Donnent une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

 

Indices PMI S&P Global du Royaume-Uni

Donnent une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

 

Indices PMI S&P Global des États-Unis

Donnent une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

 

Décision de la Banque du Canada sur les taux d'intérêt et conférence de presse

Révèlent la plus récente décision concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

25 janvier

Indice allemand IFO de confiance des entreprises

Évalue la confiance des entreprises en Allemagne et mesure leurs attentes pour les six prochains mois.

 

Décision de la BCE sur les taux d'intérêt et conférence de presse

Révèlent la plus récente décision concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

 

Commandes de biens durables aux États-Unis

Suit le volume des nouvelles commandes passées auprès des fabricants de biens durables.

 

PIB des États-Unis

Mesure l’activité économique d’une région.

 

Ventes de maisons neuves aux États-Unis

Donne une indication de la santé du marché de l’habitation.

 

Procès-verbal de la réunion sur la politique monétaire de la Banque du Japon

Donne un aperçu plus approfondi du processus décisionnel de la banque centrale.

 

Indice Gfk de confiance des consommateurs britanniques

Suit l'évolution de la perception qu'ont les consommateurs britanniques de leurs finances et de l'économie.

26 janvier

Indice des dépenses de consommation personnelle des États-Unis

Suit la trajectoire de l'inflation.

 

Dépenses personnelles des consommateurs américains

Mesure l'évolution de la valeur des dépenses des consommateurs américains.

 

Revenu des particuliers aux États-Unis

Mesure le revenu que les particuliers tirent de leur salaire, des prestations gouvernementales, des dividendes et des intérêts, de la propriété d'une entreprise et d'autres sources.

 

Ventes domiciliaires en cours aux États-Unis   

Donne une indication de la santé du marché de l’habitation.

 

Stocks de pétrole brut et de gaz naturel aux États-Unis

Permet de suivre l'évolution de l'offre et de la demande d'énergie.

Notes de bas de page

  • 1

    Source : CNBC, « Weekly jobless claims post lowest reading since September 2022 », 18 janvier 2024

  • 2

    Source : Sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs (résultats préliminaires), 19 janvier 2024.

  • 3

    Source : China Office of National Statistics, 17 janvier 2024

  • 4

    Source : Bloomberg News, « Why China Is Considering Rarely Used Special Bonds to Stimulate Its Economy », 21 janvier 2024

  • 5

    Source : Inflation des prix à la consommation, U.K. – Office for National Statistics, 17 janvier 2024

  • 6

    Source : Reuters, « UK wage growth slows again, offering some relief to BoE (Bank of England) », 16 janvier 2024

  • 7

    Source : Eurostat, 17 janvier 2024

  • 8

    Source : conférence de presse de la réunion du Federal Open Market Committee, 22 septembre 2022

  • 9

    Source : Sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs (résultats préliminaires), 19 janvier 2024

  • 10

    Source : Anticipations d’inflation de la Réserve fédérale d’Atlanta, janvier 2024

  • 11

    Source : Banque centrale européenne, 16 janvier 2024

  • 12

    Source : Ministère des Affaires internes et des communications du Japon

  • 13

    Source : CNBC, « Fed’s Christopher Waller advocates moving ‘carefully’ with rate cuts », 16 janvier 2024

  • 14

    Source : Bloomberg, 19 janvier 2024