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Marchés et économie
Des revirements électoraux et économiques
La France et le Royaume-Uni ont observé des revirements politiques lors des récentes élections. Quelles pourraient en être les conséquences pour les investisseurs?
Le président du conseil de la Fed, Jay Powell, a livré un message essentiellement belliciste. Mais je crois que ces commentaires étaient principalement destinés à faire passer un message; je ne m'attends pas à ce que la Fed relève à nouveau ses taux d'intérêt.
La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré que les dirigeants de la banque centrale devraient expliquer les prévisions de manière plus nuancée et fournir de meilleures explications en cas d'erreur.
L'une des personnes interviewées a semblé insinuer qu'un resserrement insuffisant de la part de la Fed pourrait être pire qu'un resserrement excessif. Mais je pense que ce serait une erreur compte tenu de l'incertitude économique.
Le très attendu symposium économique de la Réserve fédérale de Kansas City à Jackson Hole a eu lieu la semaine dernière. Il s'agit d'un des événements incontournables pour les économistes et les observateurs du marché, au même titre que la conférence de Sintra au Portugal. Comme je l'expliquais à mon fils aîné, scénariste en herbe : « c'est comme une cérémonie de remise de prix prestigieuse qui réunit des vedettes, mais pour les économistes au lieu des cinéastes ». Pour pousser l'analogie un peu plus loin, voici un récapitulatif du symposium de Jackson Hole, inspiré de l'écran de cinéma :
Comme prévu, le président du conseil de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jay Powell, s’en est tenu au script et a livré un message essentiellement belliciste. Non, je ne crois pas que la Fed va relever à nouveau ses taux d’intérêt, mais M. Powell doit durcir le ton et c'est ce qu'il a fait. Disons simplement qu'il a essayé de faire comprendre qu'il était le « Terminator » de l'inflation.
M. Powell a précisé d’emblée que son discours serait plus long que celui de l’année dernière (presque deux fois plus long que celui de 2022), mais que son message était le même : « Au symposium de Jackson Hole l’année dernière, j’ai livré un message bref et direct. Cette année, mon discours sera un peu plus long, mais le message est le même : c’est le rôle de la Fed de ramener l’inflation à la cible de 2 % et c’est ce que nous ferons ».1
Il a bien fait comprendre que « ...même si l’inflation est redescendue après avoir culminé... elle reste trop élevée » et que la Fed est « attentive aux signaux qui montrent que l’économie ne ralentit pas comme prévu ».1 Il a souligné que les dépenses de consommation ont été robustes et que le secteur du logement montre des signes de reprise. Ces tendances, a-t-il déclaré : « pourraient justifier un resserrement accru de la politique monétaire ».1 Normalement, cette stratégie, qui consiste à utiliser ce qu’il voit dans son rétroviseur comme justificatif pour un resserrement accru m’inquiéterait, mais je suis convaincue qu’il s’agit en grande partie d’une fanfaronnade destinée à étouffer tout espoir d’un assouplissement prématuré des conditions de crédit. Enfin, il a insisté sur « l’incertitude quant au décalage avec lequel le resserrement de la politique monétaire se répercute sur l’activité économique et en particulier l’inflation »1, ce qui devrait inciter à la patience.
Il a également posé des jalons pour établir ce qui pourrait entraîner un nouveau resserrement de la politique monétaire de la Fed :
Il a conclu en énumérant les raisons pour lesquelles la Fed doit être prudente : « Nous naviguons sans voir les étoiles parce que le ciel est nuageux ».1
La présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a axé son discours sur le thème de la conférence : les changements structurels de l’économie mondiale. Elle a envisagé ce que l’avenir pourrait nous réserver en fonction des trois changements majeurs qui ont un impact sur l’économie : le marché du travail, les changements climatiques, ainsi que le secteur de l’énergie et les événements géopolitiques. (Le gouverneur de la Banque du Japon, Kazuo Ueda, a lui aussi parlé de l’impact des événements géopolitiques sur l’avenir et a noté que « les effets à plus long terme des facteurs géopolitiques sur l’économie japonaise sont, sans surprise, très difficiles à prévoir ».2)
Cependant, Mme Lagarde a également identifié certaines tendances positives. En particulier, elle a fait remarquer que la pandémie a accéléré la numérisation, ce qui a augmenté la capacité de travailler à distance et devrait rendre le marché du travail plus souple et contribuer à accroître le taux de participation de la population active. Elle a fait valoir que l’essor de l’intelligence artificielle (IA) devrait aussi être bénéfique et tenté de dissiper les craintes selon lesquelles l’intelligence artificielle et d’autres innovations technologiques vont entraîner des pertes d’emplois importantes. Elle a reconnu l’existence d’une recherche selon laquelle plus du quart des emplois dans les économies avancées risquent d’être supprimés parce qu’ils reposent sur des compétences qui pourraient facilement être « automatisées » grâce à l’IA. Cependant, elle a souligné que des recherches de la BCE montrent que l’emploi dans les métiers les plus exposés à l’IA a augmenté dans la plupart des pays européens au cours de la dernière décennie, ce qui va à l’encontre de l’idée selon laquelle la révolution de l’IA conduira nécessairement à un déclin de l’emploi.
(Pour en savoir davantage sur l’IA, je vous invite à écouter le plus récent épisode de Conversations sur les marchés qui porte sur ce sujet avec mes collègues Brian Levitt et Ashley Oerth.)
Mme Lagarde a également mis l’accent sur trois principes clés pour l’élaboration de la politique monétaire à l’avenir : clarté, flexibilité et humilité. L’accent qu’elle a mis sur l’humilité, notamment en ce qui concerne les prévisions, était particulièrement approprié, à mon point de vue, et est en phase avec les efforts déployés par la Banque d’Angleterre pour améliorer ses prévisions. Elle a donné l’explication suivante : « Nous ne pouvons pas fonder notre politique sur des règles simples ou des cibles intermédiaires en raison de l’incertitude qui règne sur l’économie... Par conséquent, nous ne pouvons pas nous appuyer exclusivement sur des modèles élaborés à partir de vieilles données, en essayant d’affiner notre politique à partir de prévisions ponctuelles. Parallèlement, nous devons également éviter un autre écueil, à savoir trop nous concentrer sur les données actuelles et ‘conduire en regardant uniquement dans le rétroviseur’, car cela risque de faire de la politique monétaire une force réactive plutôt que stabilisatrice ».3
J’ai trouvé très efficace qu’elle ait cité des recherches qui montrent que les ménages font moins confiance aux prévisions des banques centrales si leurs prévisions récentes ont été erronées. Elle a proposé deux solutions : expliquer les prévisions de manière plus nuancée et fournir de meilleures explications en cas d’erreur. Elle a insisté sur le fait que la BCE a commencé à divulguer les principaux facteurs à l’origine des erreurs de prévisions sur l’inflation de la BCE et qu’elle entend continuer à le faire.
L’un des principaux éléments à retenir de la conférence oscille autour du thème du film « Le Grand Frisson » (film sous-estimé de Mel Brooks qui remonte aux années 70), qui traite de l’anxiété maladive. Un certain nombre de conférenciers se disent inquiets du fait que certains changements structurels, tels que les barrières commerciales et les changements dans les chaînes d’approvisionnement induites par la politique industrielle, pourraient engendrer une conjoncture d’inflation plus élevée, qui pourrait à son tour conduire à des taux plus élevés pendant une période plus longue. Mme Lagarde a déclaré que « la nouvelle conjoncture ouvre la voie à des chocs de prix relatifs plus importants qu’avant la pandémie ». Le vice-gouverneur de la Banque d’Angleterre, Ben Broadbent, a évoqué les causes de la forte inflation au Royaume-Uni et s’est inquiété plus précisément de la croissance future des salaires. Il a conclu en disant que la politique monétaire « pourrait bien devoir rester en territoire restrictif »4 pendant un certain temps encore. En d’autres mots, les taux d’intérêt risquent de demeurer élevés.
Aucun tapis rouge de cérémonie de remise de prix ne serait complet sans une foule d’entrevues en marge de la cérémonie et il en va de même de Jackson Hole. Une entrevue en particulier a attiré mon attention, celle de Loretta Mester, présidente de la Réserve fédérale de Cleveland, qui a déclaré ceci : « Mon scénario de référence en est un d’atterrissage en douceur... »5, ce qui semble confirmer l’idée qu’un resserrement insuffisant de la part de la Fed serait pire qu’un resserrement excessif. Je pense que c’est une erreur; nous ne sommes pas du tout dans « La Dolce Vita ». À mon avis, de plus en plus d’éléments indiquent que les États-Unis risquent de vivre un atterrissage brutal, plutôt qu’un atterrissage en douceur.
Voici quelques-uns de ces éléments : la semaine dernière, S&P Global a rendu public l’indice préliminaire des gestionnaires en approvisionnement (PMI) des États-Unis pour le mois d’août, qui montre que l’indice PMI manufacturier des États-Unis s’est replié davantage en territoire de contraction, à 47 points, contre 49 en juillet.6 L’indice PMI du secteur tertiaire des États-Unis est encore plus préoccupant. Bien que toujours en territoire expansionniste, à 50,4 points, les données du mois d’août sont nettement inférieures à celles de juillet, soit 52,3 points, et sont à leur plus bas niveau en six mois, sans compter que les nouvelles commandes ont chuté pour la première fois depuis le mois de février.6
Je crois que le risque d’un resserrement excessif est plus grand pour la Fed que celui d’un resserrement insuffisant à ce stade‑ci, à plus forte raison compte tenu de l’incertitude qui règne en ce moment. D’ailleurs, la semaine dernière, un rapport sur les bénéfices de Macy’s nous a rappelé à quel point il est difficile de prédire l’avenir : « À la lumière des pressions macroéconomiques qui perdurent et de l’incertitude quant au moment où elles s’atténueront, l’entreprise continue de faire preuve de prudence à l’égard des consommateurs... »7
Il ne s’agit pas d’un problème qui se limite aux frontières des États-Unis. D’autres économies développées sont confrontés à des enjeux similaires. Selon les premières données du sondage PMI de S&P Global pour le mois d’août, la zone euro et le Royaume-Uni connaissaient un ralentissement de l’activité économique. Toutefois, ces chiffres contrastent avec les résultats impressionnants de l’estimation préliminaire des indices PMI du Japon, où l’indice PMI du secteur tertiaire a atteint le seuil très élevé de 54,3 points.8 Cette situation nous rappelle l’impact négatif du resserrement de la politique monétaire dans les économies développées occidentales et de son effet retardé. Espérons que cela incitera les dirigeants des banques centrales à « faire ce qu’il faut », comme dans le film La Pizzeria en Révolte et à mettre fin à leurs cycles respectifs de hausses des taux.
Je m’en voudrais de ne pas mentionner l’importante annonce faite par la Chine la semaine dernière concernant la réduction du droit de timbre, qui est une taxe sur les opérations en valeurs mobilières. Les actions de la Chine et de Hong Kong ont réagi positivement à cette annonce, ce qui n’est pas surprenant. Les rares fois où cela s’est produit au cours des dernières décennies, les cours boursiers se sont envolés. Comme je l’ai dit précédemment, vu l’aura négative qui entoure les actions chinoises, tout soutien politique pourrait avoir un impact positif sur les cours boursiers. J’espère que cela sera à l’« Origine » d’autres mesures politiques visant à soutenir l’économie et les marchés chinois.
Source : Réserve fédérale américaine, transcription de l’allocution de Jerome Powell, 25 août 2023
Source : Reuters, « BOJ Ueda says China's slowdown adds to economic uncertainty », 28 août 2023
Source : Transcription de l’allocution de Christine Lagarde de la Banque centrale européenne, 4 août 2023
Source : Transcription de l’allocution de Ben Broadbent de la Banque d’Angleterre, 26 août 2023
Source : FXStreet, « Fed’s Mester: Undertightening would be worse than overtightening », 25 août 2023
Source : S&P Global, 23 août 2023 Les indices des gestionnaires en approvisionnement sont mesurés sur une échelle de 0 à 100 points. Un résultat supérieur à 50 points indique une expansion. Un résultat inférieur à 50 points indique une contraction.
Source : Communiqué de presse sur les résultats du deuxième trimestre de Macy's, 22 août 2023
Source : S&P Global, 23 août 2023
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Renseignements importants
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Image d’en-tête du blogue : Brian Fulda / Stocksy
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Les placements dans des sociétés situées dans la Chine élargie ou qui y exercent leurs activités sont exposés aux risques suivants : nationalisation, expropriation ou confiscation de biens, difficulté à obtenir ou à faire appliquer des jugements, modification ou interruption des réformes économiques, conflits militaires et dépendance de la Chine à l’égard des économies d’autres pays asiatiques, dont bon nombre sont des pays en développement.
Les indices des gestionnaires en approvisionnement reposent sur des sondages mensuels menés auprès des entreprises du monde entier et évaluent la conjoncture économique dans les secteurs manufacturier et tertiaire.
Les banques centrales peuvent resserrer leur politique monétaire pour contenir l'inflation.
Les opinions exprimées ci-dessus sont celles de l’auteure au 28 août 2023. Ces commentaires ne doivent pas être interprétés comme des recommandations, mais comme une illustration des grands thèmes. Les énoncés prospectifs ne sont pas garants du rendement futur. Ils comportent des risques et des incertitudes et sont fondés sur des hypothèses; nous ne pouvons pas vous garantir que les résultats réels ne différeront pas considérablement de nos attentes.
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