Marchés et économie

Tour d'horizon des marchés mondiaux : production manufacturière, déclarations de bénéfices, inflation et autres

Apprentie ingénieure qui opère une machine à commande numérique dans une usine.
Points importants à retenir
Ralentissement de la production manufacturière
1

Les indices des gestionnaires en approvisionnement ont indiqué un ralentissement de la production manufacturière au Japon, dans la zone euro et au Royaume-Uni. 

Taux des bons du Trésor
2

Le taux des bons du Trésor américain à 10 ans a continué à évoluer en dents de scie, alors que de nombreux facteurs ont contribué à de fortes fluctuations de cette donnée cruciale. 

Période de déclaration des bénéfices
3

Jusqu'à présent, les entreprises qui ont déclaré des bénéfices de troisième trimestre supérieurs aux prévisions n'ont généralement pas été récompensées par les marchés, alors que celles qui ont raté leur cible ont été punies.

La semaine dernière, les rapports se sont succédé à un rythme effréné. Certains nous ont éclairés, tandis que d’autres ont simplement envoyé des signaux contradictoires. Côté clarté, les indices des gestionnaires en approvisionnement ont indiqué un ralentissement de la production manufacturière au Japon, dans la zone euro et au Royaume-Uni. Côté signaux contradictoires, on trouve le taux des bons du Trésor américain à 10 ans, qui a continué à évoluer en dents de scie, alors que de nombreux facteurs ont contribué à de fortes fluctuations de cette donnée cruciale. Dans cet article, je vais également vous parler de la période de déclaration des bénéfices, de la politique budgétaire chinoise, de l'inflation aux États-Unis et, bien sûr, des banques centrales.

La production manufacturière est plus faible au Japon, dans la zone euro et au Royaume-Uni

La semaine dernière, les indices des gestionnaires en approvisionnement (PMI) de nombreux pays ont été dévoilés. Les sondages PMI m'intéressent toujours car ils nous donnent un instantané de l'état d'une économie.

  • Japon. Les estimations préliminaires des indices PMI1 du Japon pour le mois d’octobre nous révèlent que les deux segments de l’économie n’évoluent pas au même rythme; le secteur tertiaire se porte mieux que le secteur manufacturier. L’indice PMI manufacturier a clôturé à 47,6 points, ce qui le place en contraction. L’indice PMI du secteur tertiaire s’est fixé à 51,1 points, en baisse par rapport au mois précédent (53,8 points), mais toujours en expansion, grâce sans doute aux mesures de relance budgétaire et à la politique monétaire accommodante.
  • Zone euro. L’économie de la zone euro est soumise à de fortes pressions, son indice composé préliminaire PMI2 n’a jamais été aussi bas en 35 mois. L’indice PMI manufacturier est le plus faible, à 43,1 points. L’indice PMI du secteur tertiaire est meilleur (à 47,8 points), mais reste en mode contraction. Il convient de noter l’extrême faiblesse de l’indice PMI manufacturier de l’Allemagne, qui s’est établi à 41,4 points. Dr Cyrus de la Rubia, économiste en chef de la Hamburg Commercial Bank, qui est chargé des sondages PMI, a décrit la situation comme suit : « Dans la zone euro, les choses vont de mal en pis. Le secteur manufacturier est en crise depuis seize mois et le secteur tertiaire depuis trois mois, et les deux indices PMI viennent d’encaisser un autre coup dur. En outre, les sous-indices pointent inexorablement à la baisse, à quelques exceptions près ». Il a ajouté qu’il ne serait pas surpris si nous assistions à une « légère récession » dans la zone euro pendant la deuxième moitié de l’année.
  • Royaume-Uni. On observe également un ralentissement de la production manufacturière au Royaume-Uni, où l’indice PMI manufacturier s’établit à 45,3 points et l’indice PMI du secteur tertiaire à 49,2 points.3 Les deux sont en contraction, mais le secteur manufacturier est en bien plus mauvaise posture, quoique la situation semble s’envenimer pour les consommateurs britanniques.

Le taux des bons du Trésor américain à 10 ans continue d’évoluer en dents de scie

Le taux des bons du Trésor américain à 10 ans4 a atteint 5,02 % en début de séance le 23 octobre, mais a clôturé en forte baisse. Le 26 octobre, il est reparti à la hausse, mais a terminé la semaine à 4,83 %, probablement en raison de l’augmentation de la demande de bons du Trésor, perçus comme des « valeurs refuges », compte tenu de l’intensification de la guerre entre Israël et le Hamas. Il est probable qu’il continue à évoluer dans une large fourchette étant donné les nombreux facteurs qui ont une incidence sur les taux à 10 ans et le manque de clarté de la part de la Réserve fédérale américaine (Fed) quant à l’orientation de sa politique monétaire.

Les marchés semblent faire fi des bénéfices supérieurs aux attentes

La période de déclaration des bénéfices du troisième trimestre5 bat son plein. Aux États-Unis, 78 % des sociétés de l’indice S&P 500 ont enregistré une hausse du bénéfice par action plus forte que prévu et 62 % ont signalé une hausse des bénéfices inattendue (jusqu’ici, 49 % des sociétés de l’indice S&P 500 ont dévoilé leurs bénéfices).

Jusqu’à présent en Europe, 57 % des sociétés de l’indice Stoxx600 ont déclaré des bénéfices supérieurs aux estimations, tandis qu'au Japon, 58 % des entreprises inscrites à la cote de l’indice Topix ont dépassé les estimations. Plusieurs entreprises n’ont pas encore divulgué leurs résultats, mais ce qu’il faut retenir, c’est qu’en gros, les entreprises qui ont déclaré des bénéfices supérieurs aux prévisions n’ont généralement pas été récompensées par les marchés, alors que celles qui ont raté leur cible ont été punies.

La Chine prévoit augmenter ses dépenses budgétaires

Les autorités chinoises ont annoncé une forte augmentation de la dette pour financer des dépenses budgétaires ciblées.6 Nous n’avons pas beaucoup de détails, mais nous pouvons présumer que cela indique une volonté d’accélérer la croissance économique, même si elle semble déjà en voie d’atteindre la cible de croissance du produit intérieur brut (PIB) de 5 % fixée par le gouvernement. Les dépenses budgétaires ciblées ont jusqu’à présent eu un effet positif sur la confiance et les dépenses des consommateurs et je m’attends à ce que cette initiative ait le même effet, mais de manière encore plus substantielle.

L’inflation aux États-Unis est contenue, mais l’économie tourne à plein régime et les anticipations d’inflation augmentent considérablement

Nous n’avons pas été surpris par l’indicateur d’inflation le plus surveillé par la Fed, à savoir les dépenses de consommation personnelle. L’indice a avancé de 0,3 % sur un mois en septembre, ce qui est conforme aux attentes, et de 3,7 % sur douze mois.7 Cela a permis aux marchés de pousser un soupir de soulagement, car ces données ne contredisent pas la thèse selon laquelle le processus de désinflation se poursuit.

Cependant, il y a eu quelques accrocs la semaine dernière. Le PIB du troisième trimestre a montré une économie robuste alimentée par les consommateurs américains. Or, ces chiffres reflètent les dépenses de consommation avant la remise en vigueur de l’obligation de remboursement des prêts étudiants. Nous commençons à voir des signes de ralentissement de la consommation; par exemple, les arriérés de paiement des prêts automobiles sont en hausse et cela devrait se traduire par une certaine diminution de la demande.

Ensuite, les anticipations d’inflation des consommateurs selon le sondage de l’Université du Michigan pour le mois d’octobre ont révélé une augmentation spectaculaire sur un an, mais plus modeste sur cinq ans.8 Les anticipations d’inflation à court terme sont habituellement plus volatiles et souvent influencées par les prix de l’énergie. Nous avions observé un pic similaire des anticipations d’inflation sur un an entre mars et avril 2023, alors que le prix du pétrole brut était en forte hausse.

Il importe de noter que la Fed accorde une attention particulière aux anticipations d’inflation et veille à ce que les anticipations à long terme (plutôt que celles à court terme, en l’occurrence sur un an) soient « bien ancrées ». Comme elle se concentre sur les anticipations à long terme, je ne m’attends pas à ce qu’elle relève ses taux à sa réunion de novembre, malgré l’augmentation des anticipations d’inflation.

Les banques centrales du Canada et de l’Europe laissent les taux inchangés

La semaine dernière, la Banque du Canada et la Banque centrale européenne (BCE) ont décidé de laisser leurs taux directeurs inchangés. Dans le cas de la BCE, cette décision survient après dix hausses de taux consécutives. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a admis que les risques qui planent sur la croissance économique vont en diminuant (mais elle s’est empressée d’ajouter qu’il est encore beaucoup trop tôt pour envisager une baisse de taux).

Depuis plusieurs années, la Banque du Canada est à l’avant-garde des mouvements de politique monétaire. Nous ne sommes donc pas étonnés que sa décision de la semaine dernière de laisser les taux inchangés à l’issue de deux réunions consécutives, après dix hausses de taux, ait précédé une décision similaire de la BCE et je crois que cela laisse présager une décision similaire de la Fed cette semaine. La Banque d’Angleterre et la Banque du Japon se réunissent également cette semaine.

Mise à jour : Peu après la publication de cet article, la Banque du Japon (BdJ) a décidé d’assouplir sa politique de contrôle de la courbe des taux à sa réunion de politique monétaire d’octobre. Elle avait imposé un plafond strict de 1,0 % aux taux des obligations d’État japonaises (JGB) à 10 ans. Elle vient tout juste de décider que le seuil de 1,0 % serait désormais seulement un point de « référence » (non pas un plafond strict), ce qui permet effectivement au taux de dépasser 1 % si la BdJ le juge approprié. Cette nouvelle politique a surpris les marchés, mais elle n’aurait peut-être pas dû étonner autant, puisque la BdJ a révisé à la hausse le taux d’inflation de base médian anticipé, qui est passé de 3,2 à 3,8 % pour l’exercice 2023, et que le taux des bons du Trésor américain à 10 ans a monté en flèche récemment.

Le gouverneur de la BdJ, Kazuo Ueda, a souligné l’importance du prochain Shunto (négociations salariales collectives annuelles entre les entreprises et les syndicats) pour déterminer si le Japon sera ou non en mesure d’atteindre sa cible d’inflation durable de 2 %. Presque tous s’attendent à ce qu’une forte augmentation des salaires à l’issue du Shunto déclenche un mouvement de resserrement de la BdJ, qui se traduirait par une augmentation du taux cible des JGB à 10 ans ou par l’abolition de sa politique de taux d’intérêt négatifs, voire même les deux. À notre avis, la révision à la hausse des perspectives d’inflation de la BdJ a fait augmenter les probabilités d’un resserrement de la politique monétaire en 2024.

Comme il est plus probable que le Japon atteigne sa cible d’inflation durable de 2 %, le pays a de meilleures chances de connaître une croissance intérieure plus forte, ce qui serait probablement bénéfique pour les actions japonaises. D’un point de vue cyclique, l’économie japonaise demeure dynamique et il nous semble peu probable que la hausse limitée des taux des obligations japonaises à long terme et l’appréciation du yen sapent la croissance économique, ce qui devrait continuer à soutenir les actions japonaises à court terme.

Importante leçon de vie

Je m’en voudrais de ne pas souligner le décès du stratège chevronné Byron Wien la semaine dernière. J’ai eu le privilège de le croiser à plusieurs reprises au cours des trois dernières décennies et j’ai été frappée par sa sagesse, son humour et son dévouement au mentorat. J’ai été particulièrement inspirée par cet enseignement tiré de ses 20 leçons de vie : « Si vos enfants sont grands ou si vous n’avez pas d’enfants, trouvez toujours quelqu’un de plus jeune à encadrer. Il est très satisfaisant d’aider quelqu’un à franchir les obstacles de la vie et vous serez surpris de tout ce que vous apprendrez en cours de route ».

Dates à surveiller

Les rapports se succèdent sans relâche. Vous trouverez ci-dessous la liste de ceux que je surveille. Le 1er novembre, je vous invite à vous joindre à moi sur X, autrefois Twitter, pour connaître mon point de vue en temps réel sur la décision de taux d’intérêt du Federal Open Market Committee et les principaux éléments à retenir de la conférence de presse du président du conseil de la Fed, Jay Powell, au fur et à mesure qu’elle va se dérouler.

Rédigé en collaboration avec Tomo Kinoshita.

Date

Rapport

Ce qu'il nous dit

31 octobre

IPC de la zone euro

Suit la trajectoire de l'inflation.

31 octobre

PIB de la zone euro

Mesure l’activité économique d’une région.

31 octobre

Indice américain du coût de l’emploi

Mesure la variation de la rémunération totale des salariés chaque trimestre.

31 octobre

PIB du Canada

Mesure l’activité économique d’une région.

31 octobre

Indice américain des prix des maisons S&P CoreLogic Case-Shiller

Mesure les prix de l'immobilier résidentiel aux États-Unis.

31 octobre

Décision de politique monétaire de la Banque du Japon

Révèle la plus récente décision concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

1er novembre

Indices PMI (ISM) des États-Unis

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

1er novembre

Sondage sur les postes à pourvoir et le roulement de personnel (Job Openings and Labor Turnover Survey ou JOLTS) aux États-Unis

Génère des données sur le nombre de postes à combler, l’embauche et les départs.

1er novembre

Réunion du Federal Open Market Committee (FOMC)

Révèle la plus récente décision de la Réserve fédérale américaine concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

2 novembre

Décision de politique monétaire de la Banque d’Angleterre

Révèle la plus récente décision concernant la trajectoire des taux d'intérêt.

3 novembre

Rapport sur l’emploi aux États-Unis

Donne une indication de la santé du marché du travail.

3 novembre

Rapport sur l’emploi au Canada

Donne une indication de la santé du marché du travail.

3 novembre

Indices PMI (S&P Global) des États-Unis

Donne une indication de la santé économique des secteurs manufacturier et tertiaire.

 

la période de déclaration des bénéfices se poursuit…

 

Notes de bas de page

  • 1

    Source de toutes les données sur les indices PMI du Japon : S&P Global / AuJibun

  • 2

    Source de toutes les données et citations sur les indices PMI de la zone euro et de l’Allemagne : S&P Global/HCOB

  • 3

    Source : S&P Global

  • 4

    Source de toutes les données sur les taux des bons du Trésor américain : Bloomberg, L.P., au 26 octobre 2023

  • 5

    Source de toutes les données relatives à la période de déclaration des bénéfices : Factset Earnings Insight, JP Morgan Earnings Season Tracker

  • 6

    Source: Reuters

  • 7

    Source : US Bureau of Economic Analysis

  • 8

    Source : Sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs, octobre 2023