Marchés et économie

Conversations sur les marchés : qu’ont de spécial ces élections américaines de mi-mandat?

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Alors que les Américains se rendent aux urnes, le chef des politiques publiques mondiales d’Invesco, Andy Blocker, se joint à Jodi Phillips et à Brian Levitt pour parler des enjeux qui animent les électeurs aujourd’hui. Ils discutent également des principales lois qui ont été adoptées récemment par le Congrès actuel et de ce qui est à l’origine de l’élan de consensus bipartite de l’été dernier.

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Brian Levitt :

Bonjour, je m’appelle Brian Levitt.

Jodi Phillips :

Je m’appelle Jodi Phillips. Aujourd’hui, nous nous entretenons avec Andy Blocker, chef des politiques publiques mondiales, et notre expert résident pour tout ce qui concerne Washington. Et, en ce moment, ce sont les élections de mi-mandat du 8 novembre qui retiennent l’attention.

Brian Levitt :

Exact, Jodi, les élections de mi-mandat. Vous savez ce que David Letterman disait au sujet des élections de mi-mandat?

Jodi Phillips :

Quoi donc?

Brian Levitt :

Il disait : « C’est le jour où les Américains quittent leur travail tôt pour faire semblant d’aller voter. »

Jodi Phillips :

D’accord. Je ne me lancerai pas dans un argumentaire avec M. Letterman, mais les spéculations sont nombreuses à savoir si le record de participation de l’ère moderne pourrait être pulvérisé pour les élections de mi-mandat cette année, après celui qui avait été établi en 2018.

Brian Levitt :

La moitié de la population du pays était allée voter en 2018, je crois. À peu près 50,1 % des électeurs si je me souviens bien.

Jodi Phillips :

En effet, ce n’est pas un record impressionnant, mais il s’agit quand même d’un record. Pour les démocrates, on s’attend à ce que les débats très médiatisés entourant le renversement de l’arrêt Roe c. Wade et les audiences du comité du 6 janvier attirent davantage de démocrates aux urnes cette fois-ci.

Brian Levitt :

Oui, si les démocrates réussissent à conserver leur majorité, ce serait un peu différent de ce que nous avons l’habitude de voir. Traditionnellement, les élections de mi-mandat ne sont pas très favorables au parti du président, mais nous verrons bien. Nous verrons bien. La cote de confiance de M. Biden avait nettement reculé, mais elle semble remonter un peu. Nous verrons donc s’il réussira à s’en tirer différemment de M. Obama, de M. Clinton et de M. Trump.

Jodi Phillips :

Nous verrons bien. Brian, avant d’aborder cette question et avant de donner la parole à Andy, j’aimerais vous poser une question sur la façon dont les marchés réagissent aux élections de mi-mandat. Les marchés pencheraient-ils clairement en faveur d’un résultat plutôt qu’un autre?

Brian Levitt :

Oui, c’est une bonne question Jodi. Si l’on analyse le rendement des 121 dernières années, soit depuis la création du Dow, on constate une préférence pour un gouvernement multipartite par rapport à un gouvernement contrôlé par un seul parti. C’est un commentaire qui revient souvent dans le secteur. J’ai toujours entendu dire que les marchés préfèrent les gouvernements divisés. Il est difficile de savoir s’il s’agit d’une affirmation qui se confirme sur le plan statistique. Laissez-moi vous donner un exemple. Au terme de cette élection, un des scénarios serait évidemment qu’un démocrate se trouve à la Maison-Blanche, que son parti contrôle le Sénat et que les républicains soient majoritaires à la Chambre des représentants. Ce scénario n’est pas coulé dans le béton, mais il s’agit d’une issue possible. En fait, c’est celui qui a été le plus rassurant pour les marchés au cours des 121 dernières années. Or, savez-vous ce qu’il y a d’intéressant à ce sujet, Jodi?

Jodi Phillips :

Quoi donc?

Brian Levitt :

Cela ne s’est produit que pendant une période de quatre ans, de 2011 à 2015 seulement.

Jodi Phillips :

Quatre ans sur 121, c’est tout?

Brian Levitt :

C’est du moins la conclusion à laquelle j’arrive. Andy me dira peut-être si j’ai tort, mais j’ai essayé de confirmer mon hypothèse en consultant Wikipedia.

Jodi Phillips :

Bon, voilà.

Brian Levitt :

Oui, on ne peut pas véritablement vérifier notre hypothèse sur le plan statistique, mais le contexte pourrait s’apparenter à la sortie de récession de 2009-2010 à 2011 et être favorable aux marchés.

Jodi Phillips :

Eh bien, espérons-le. C’est le moment d’accueillir Andy et de lui demander de nous expliquer en primeur à quoi pourrait ressembler la composition du gouvernement au terme de ces élections de mi-mandat. J’aimerais aussi parler de certaines lois que notre Congrès a adoptées au cours de l’été et des derniers mois, et des répercussions qu’elles pourraient avoir sur les investisseurs et les contribuables.

Brian Levitt :

Voici donc Andy Blocker. Bienvenue!

Andy Blocker :

Heureux de vous retrouver.

Brian Levitt :

Bonjour Andy, commençons par brosser un portrait d’ensemble. À quoi vous attendez-vous en novembre?

Andy Blocker :

C’est une excellente question, car les attentes changent d’un jour à l’autre. Cette année, le contexte est bien différent de ce que nous avons vu par le passé. Ce que je veux dire, c’est que nous remettons en question les conventions. En fait, notre pays a été fondé au moment de notre rébellion contre les Britanniques, et nous n’aimons pas qu’un groupe ou un parti détienne les leviers du pouvoir trop longtemps. Par le passé, nous nous contentions d’éjecter les incompétents, de changer la composition du gouvernement ou, du moins, d’élire d’autres personnes pour limiter les dégâts.

Andy Blocker :

Par conséquent, chaque fois qu’un parti détient les trois leviers de pouvoir, à savoir la présidence, la Chambre des représentants et le Sénat, nous préférons en retirer au moins un des mains du parti qui occupe la présidence. D’ailleurs, les statistiques à ce sujet sont éloquentes. Au cours des 30 dernières années, une période somme toute assez courte, je pense qu’en moyenne le parti au pouvoir perdait environ 47 sièges à la Chambre des représentants et de 4 à 5 sièges au Sénat. Voilà ce qui s’est produit dans le passé, et je crois que c’est ce qui pourrait se produire dans le présent cycle électoral.

Brian Levitt :

C’est ce qu’Obama avait qualifié de dégelée, c’est ça? C’était en 2010, je crois, que le président Obama a obtenu le pire résultat des 30 dernières années aux élections législatives.

Andy Blocker :

Exact, mais son parti n’avait pas été entièrement balayé. De plus, je crois que le parti au pouvoir est toujours en partie responsable du résultat, car ils ont tendance à en mener large dès leur arrivée. Ils se concentrent sur leur programme et ils ne travaillent pas assez avec l’autre parti. Je pense qu’il s’agit simplement du réflexe que nous avons de leur signaler qu’ils ont détenu l’ensemble des pouvoirs pendant quelques années et qu’il est temps de passer à autre chose. » Sans compter que le parti sur la touche a fait le plein d’énergie, notamment parce que ce sont ses partisans qui se sentent lésés.

Jodi Phillips :

Alors, Andy, selon vous, qu’est-ce qui stimule les électeurs cette fois-ci? Qu’est-ce que les plus récents sondages nous apprennent sur les questions les plus importantes aux yeux des électeurs en ce moment? Où les enjeux économiques se retrouveraient-ils sur cette liste?

Andy Blocker :

C’est vraiment la question clé. Qu’est-ce qui va motiver les gens à aller voter? Je viens de vous en donner une et il s’agit simplement de leur envie de se débarrasser de ces gens-là avant qu’ils ne détruisent le pays. Ensuite, il y a les enjeux économiques. Mon ancien collègue James Carville disait : « C’est l’économie, idiot. » Et c’est encore vrai aujourd’hui. C’est essentiellement une période difficile dans les deux cas si l’on se fie aux données historiques quant à la situation des démocrates durant les législatives et aux statistiques économiques. L’inflation est donc beaucoup plus élevée que ce qui aurait été souhaitable à l’approche des élections. Elle semblait s’apaiser, mais les données du dernier mois ont indiqué que ce n’était pas le cas. Reste à savoir à quoi s’attendre en novembre. Les cartésiens vous diront de ne pas tenir compte des revenus, des prix de l’essence. Or, ce sont ces éléments qui ont un impact sur la vie quotidienne des gens.

Andy Blocker :

Il existe une corrélation presque inversement proportionnelle entre les prix du gaz et la cote de confiance à l’égard de M. Biden. C’est comme si elle baisse à mesure que les prix de l’essence augmentent. C’est une grande source de motivation. Certaines personnes font un lien entre le parti au pouvoir et la conjoncture, qu’elle lui soit ou non imputable. Or, il y a le conflit entre l’Ukraine et la Russie. Nous sortons d’une pandémie. Il y a tous ces facteurs, mais peu importe, le parti au pouvoir est tenu responsable des difficultés de la population qui veut le remplacer par un autre.

Andy Blocker :

Mais je crois qu’il existe des forces contraires intéressantes dans le présent cycle qui ne s’étaient pas manifestées auparavant. En fait oui, dans le cas de la première : Donald J. Trump. Plus Donald J. Trump fait les manchettes, plus il motive les gens qui ne l’aiment pas, ce qui est une bonne chose pour les démocrates. Quelle que soit l’enquête dont il fait l’objet ou qu’importe ce qu’il dit, il fait les manchettes. Je pense qu’en bout de piste, cela incitera davantage les démocrates que les républicains à aller voter, car son nom ne figure pas sur le bulletin de vote. Sa candidature génère des taux de participation records. C’est ce qui s’est produit en 2020. Il a aidé les républicains à remporter des sièges à la Chambre des représentants l’année au cours de laquelle M. Biden a été élu président. En 2018, il a toutefois causé beaucoup plus de tort au parti républicain. Même s’il ne s’agissait pas d’un sommet, il a fait perdre un grand nombre de sièges aux républicains qui se sont fait ravir la majorité à la Chambre des représentants. Je crois qu’il s’agit d’un facteur réel, mais que celui qui est encore plus important cette année est le débat sur l’avortement et l’arrêt Roe v. Wade.

Brian Levitt :

Tout à fait. Bien, j’allais simplement mentionner que Carville a aussi dit qu’il voulait se réincarner en marché obligataire pour pouvoir effrayer tout le monde, et cela rejoint un peu ce que vous dites au sujet de l’inflation. Je ne sais pas, Jodi, si vous l’avez déjà entendu dire qu’il ne veut pas être une vedette du rock. Il ne veut pas…

Jodi Phillips :

Non, c’est la première fois que j’entends ça.

Brian Levitt :

qu’il ne veut pas être un joueur de baseball étoile, mais qu’il voudrait se réincarner en marché obligataire pour effrayer tout le monde. C’est bel et bien ça qui se produit cette année. Les taux sont en forte hausse, les valorisations boursières sont en baisse et tout ça est lié à l’inflation dont parlait Andy. Alors oui, je veux entendre parler de l’arrêt Roe v. Wade et de l’avortement et des répercussions sur la participation aux élections.

Brian Levitt :

Avant même d’aborder le sujet, Andy, vous avez mentionné le prix de l’essence et la cote de confiance de M. Biden et j’aimerais en savoir plus à ce sujet. Y a-t-il un seuil à partir duquel la cote de confiance peut changer la donne? Il me semble que la cote de M. Biden était à peine plus élevée que 40. Pensez-vous que sa cote s’est redressée depuis que les prix de l’essence sont légèrement descendus et que cette remontée durera pendant quelques semaines, compte tenu de la réduction de la production de pétrole annoncée par l’OPEP?

Andy Blocker :

Non, je pense que vous avez raison. Sa cote s’est redressée et continue de remonter. Elle oscille peut-être autour de 45, maintenant? En fait, ça dépend si vous vous appuyez sur RealClearPolitics ou si vous utilisez un sondage en particulier. Mais non, la tendance lui est encore favorable et c’est pourquoi, selon moi, l’annonce de l’OPEP a été plutôt mal accueillie par l’administration qui sait ce que cela signifie. Il semblerait que Ron Klain, le chef de cabinet de M. Biden, a reconnu que c’est le prix de l’essence qu’il suit de plus près, en raison de son impact sur la vie des gens. Ce n’est pas nécessairement le cas des plus fortunés, même si ça peut les irriter, mais pas autant que les gens qui ont un revenu inférieur et qui doivent parcourir de plus grandes distances… Dans la plupart des régions métropolitaines, vous n’aurez peut-être pas à vous déplacer autant. Vous devrez peut-être parcourir 5, 10 ou 20 milles, mais dans les régions rurales, vous devrez probablement ajouter 40 ou 50 milles.

Andy Blocker :

C’est pourquoi je pense que ce facteur est important et nous verrons bien quelles en seront les conséquences. L’OPEP a bien affirmé que la production ne serait pas réduite avant novembre, mais les effets se font déjà sentir sur les marchés. En fait, le marché des contrats à terme est déjà touché. Il reste à savoir savoir à quelle vitesse cela se répercutera sur les prix à la pompe.

Jodi Phillips :

Donc, pour revenir à ce que vous disiez un peu plus tôt sur l’arrêt Roe v. Wade qui pourrait dynamiser les électeurs, y a-t-il des signes qui viendraient confirmer une telle hypothèse? En fait, y a-t-il certains indicateurs, comme le nombre d’électeurs inscrits, qui pourrait nous permettre d’estimer le taux de participation?

Andy Blocker :

Nous avons préféré être prudents à cet égard. Nous savions que cela pourrait avoir une incidence, mais nous préférons attendre de voir ce qui se passera.

Jodi Phillips :

En effet.

Andy Blocker :

Il y a beaucoup de nouvelles, beaucoup d’informations qui circulent. Le premier signe que nous avons observé et qui est venu confirmer qu’il s’agit d’une question importante est le référendum sur l’avortement au Kansas. Le Kansas est un État républicain, un État en majorité très conservateur. Or, les électeurs se sont prononcés à 59 % contre 41 % pour le droit à l’avortement, ce qui est un signal assez clair qu’il s’agit d’une question importante, parce que ce ne sont pas que les démocrates qui devaient se mobiliser, mais aussi des républicains et des indépendants, et c’est ce qui s’est produit au Kansas.

Andy Blocker :

Maintenant qu’on sait que cette question est un enjeu important, ça ne signifie pas pour autant qu’elle se répercutera sur le vote et que les électeurs changeront nécessairement de camp. Et je ne crois pas que ce sera le cas. Toutefois, nous avons observé un autre signe lors de l’élection spéciale au Congrès de New York, où le démocrate a mené sa campagne uniquement sur la question du droit à l’avortement et a remporté la course. Je crois que le résultat a été de 51 contre 49. Sans être une victoire éclatante, le résultat a quand même montré que c’était un argument gagnant.

Andy Blocker :

L’élément le plus important à mon avis concerne les républicains qui, jusqu’à maintenant, se disaient pro-vie coûte que coûte, y compris dans le cas où la vie de la mère est menacée, ou en cas de viol ou d’inceste. Or, toute mention à cet effet a soudainement disparu de leur site Web ou a été reléguée en arrière-plan. À mon avis, c’est un signe de changement de position, car ils reconnaissent qu’elle peut mettre en péril leur candidature.

Jodi Phillips :

Bon, Andy, si vous le permettez, j’aimerais parler un peu de la composition du Congrès à l’heure actuelle et de ce qui s’y est passé au cours des derniers mois. Dans l’article que vous avez publié récemment sur LinkedIn, vous évoquiez un « nouvel élan qui transcende les luttes partisanes » et qui a permis de faire avancer plusieurs dossiers en ce qui a trait aux infrastructures, à l’énergie, aux soins de santé pour les vétérans et au secteur de la fabrication. Que s’est-il passé? Qu’est-ce qui est à l’origine de cet élan?

Brian Levitt :

C’est rare que la bonne entente règne, Jodi.

Jodi Phillips :

Mon Dieu! Oui, sérieusement. Comment peut-on expliquer cette bonne entente?

Andy Blocker :

Au cours de l’année, je me suis intéressé à la façon de faire de la politique, à la sauce Trump, et je pense que c’est ce qui explique ce qui s’est passé. Mes propos ont contrarié certaines personnes qui avancent que non, ce n’est pas ainsi que les choses devraient se passer et que les meilleures idées devraient l’emporter. Je suis d’accord avec vous que les meilleures idées devraient l’emporter, mais puisque nous sommes dans un pays démocratique, les électeurs ont leur mot à dire. Donc, si vous voulez que votre bonne idée se concrétise, vous devez avoir recours à de bons arguments politiques. Vous avez le devoir de convaincre.

Andy Blocker :

Je pense que beaucoup de points que vous avez mentionnés et les lois qui ont été adoptées visaient surtout à satisfaire les électeurs en mal de collectivités plus sûres, de routes en meilleur état, d’une modernisation du secteur de la fabrication, et d’une concurrence accrue des États-Unis à l’échelle mondiale. Je pense que cela a permis d’établir des arguments de base qui sont généralement populaires. N’oublions pas qu’il y a aussi certains groupes qui militent en ce sens. Il faut obtenir l’appui de certains groupes, non seulement à grande échelle, mais aussi à plus petite échelle, pour faire bouger les choses en votre faveur. Il était nécessaire d’obtenir l’appui de membres clés des différentes chambres, du côté des représentants et des sénateurs. Le sénateur Chuck Schumer, chef de la majorité, et le sénateur Mitch McConnell, chef de la minorité, ont appuyé bon nombre de ces mesures. Avec de tels appuis, il était possible de faire avancer les choses, mais n’allez pas croire que ces appuis étaient pour autant désintéressés. Fondés sur les sondages, dans plusieurs cas, ils représentaient une forme d’opposition ou, dans certains cas, l’absence d’action a été vue comme une façon de faire contrepoids à toute tentative d’opposition.

Brian Levitt :

Si le gouvernement se retrouve divisé au début de la prochaine année, comme ce que plusieurs anticipent, y a-t-il d’autres occasions où nous pourrions voir des élans de collaboration entre les partis, Jodi? Autrement, peut-être en serons-nous quittes pour deux années difficiles de fin de mandat?

Andy Blocker :

Oui, je pense qu’on se dirige vers deux années de fin de mandat plutôt difficiles. Et je dis cela parce que je pense que l’année 2018 peut nous servir de référence, ici. En 2018, les démocrates ont repris le contrôle de la Chambre des représentants et ont passé les années suivantes tenter de destituer le président Trump à deux reprises. Si les démocrates échouent à conserver la majorité à la Chambre des représentants, je crois que les républicains vont tenter de destituer le président Biden. De plus, la division du gouvernement a également mené à sa paralysie. La dernière fois, c’était lors d’un affrontement entre Trump et les démocrates. Cette fois-ci, c’est M. Biden qui risque de se frotter à une Chambre des représentants à majorité républicaine, qui voudra probablement lui faire faire plusieurs concessions en laissant planer le spectre d’une paralysie du gouvernement. À la fin de l’année prochaine, ce sera le plafond de la dette qui sera source de tractations. L’avenir qui se dessine sera très houleux à mon avis, entre les procédures de destitutions et toutes sortes d’enquêtes. Ils auront le pouvoir d’assigner des témoins. Ce sera une période plutôt mouvementée.

Brian Levitt :

Est-ce la nouvelle réalité du pays maintenant? Nous allons simplement lancer des procédures de destitution? Je me souviens d’un chapitre que nous avons étudié en 11e année, je crois, à l’époque de la procédure de destitution lancée contre M. Clinton. Je vous laisse deviner mon âge. Puis, nous avons vu la démission de Nixon. Je pense qu’avant cela, il fallait remonter jusqu’à Andrew Johnson. Bon, j’en oublie peut-être quelques-uns. Est-ce ainsi que ça fonctionne, maintenant?

Andy Blocker :

Je pense que l’année prochaine, à tout le moins, l’heure sera aux représailles pour avoir voulu coincer l’ancien président.

Brian Levitt :

Comme le dirait ma grand-mère, « Aïe. »

Andy Blocker :

Vous savez quoi? Ce n’est même pas une question de désaccord. Ce n’est qu’une question de rivalité.

Brian Levitt :

C’est dommage. C’est dommage.

Andy Blocker :

La différence de point de vue n’importe pas. Vous êtes simplement l’ennemi. Lors de la guerre froide, nous avions un ennemi commun à l’étranger, ce qui atténuait beaucoup les tensions au pays. Cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de divergences d’opinions, mais notre énergie et notre colère étaient concentrées sur des cibles extérieures et il en restait peu à consacrer au sein même du pays. Maintenant, nous n’avons plus autant de temps pour nous préoccuper de l’extérieur, malgré une certaine unité contre la Russie à l’égard de l’Ukraine. L’étau se resserre également contre la Chine. Je pense que c’est le seul point sur lequel les deux partis s’entendront. La loi CHIPS and Science ne peut pas être adoptée si moins de 82 % des Américains n’ont pas une opinion antagoniste de la Chine. C’est impossible. La loi était perçue comme une stratégie pour rendre le pays plus concurrentiel face à la Chine, et je crois qu’il est possible de faire avancer ce dossier au sein du prochain Congrès. C’est bien le seul point qui fait consensus et qui permet de canaliser les frustrations vers l’extérieur. Oui, les deux prochaines années seront pénibles.

Jodi Phillips :

Andy, vous avez mentionné que la loi CHIPS and Science a comme objectif d’accroître la concurrence et la production des semi-conducteurs aux États-Unis. En quoi pourrait-elle avoir un effet sur les emplois manufacturiers ici?

Andy Blocker :

Nous en avons déjà quelques exemples. Intel a été la première. Elle a agi rapidement. Elle a annoncé un investissement de 20 G$ pour construire deux usines en Ohio. Plus récemment, Micron et IBM ont annoncé des investissements de 100 G$ et de 20 G$, respectivement, dans le nord de l’État de New York. Ce ne sont que quelques exemples et je pense qu’il y en aura beaucoup d’autres, car les mesures incitatives sont très intéressantes. L’objectif du projet de loi était justement d’offrir des incitatifs pour rapatrier une grande partie de ce secteur manufacturier aux États-Unis, en raison du risque que représentait la situation, comme nous l’avons constaté pendant la pandémie. De fait, les chaînes d’approvisionnement mondiales sont fragiles, d’autant plus en raison de la relation entre la Chine et Taïwan et du risque de ne pas pouvoir rapatrier cette partie de la production de semi-conducteurs aux États-Unis alors que nous en sommes toujours dépendants. Vous allez entendre de plus en plus d’annonces à ce sujet à mon avis.

Brian Levitt :

L’autre loi importante dont on peut parler brièvement est la loi sur la réduction de l’inflation ou Inflation Reduction Act. J’adore le nom de ces lois. Dans quelle mesure cette loi pourrait-elle réduire l’inflation à court terme? Mais c’est certainement un nom qui reflète bien la situation. Pouvez-vous nous expliquer en quoi la loi aidera les entreprises et les contribuables? En quoi est-ce une solution? Est-ce vraiment une solution miracle pour l’environnement et quelles sont les dispositions du projet de loi qui peuvent passer inaperçues?

Andy Blocker :

Bon, tout d’abord, le projet de loi comporte trois volets, les impôts, les dispositions en matière de santé, puis l’énergie et l’environnement que vous venez de mentionner. Sur le plan politique, je crois que les dispositions concernant les médicaments d’ordonnance sont vraiment très importantes. La question est de savoir si cette question a retenu l’attention de la population avant cette élection. Or, la capacité de Medicare de négocier le prix de nombreux médicaments d’ordonnance et d’en plafonner le coût d’une partie aura un impact énorme. Mais pour en revenir à l’énergie et à l’environnement, tout un éventail de crédits d’impôt et de rabais a été annoncé pour contribuer à réduire les coûts de l’énergie, renforcer les chaînes d’approvisionnement de minéraux essentiels et accroître la production intérieure d’énergie propre. Il s’agit selon moi du plus important investissement que nous ayons vu à ce chapitre.

Andy Blocker :

Les chaînes d’approvisionnement de minéraux essentiels et l’augmentation de la production intérieure d’énergie propre sont deux éléments importants bien entendu, mais à court terme, il ne fait aucun doute que la baisse des coûts de l’énergie à l’approche de l’hiver est un enjeu important. Alors non, je ne pense pas que quelque chose passe inaperçu. Je pense que les objectifs sont bien concrets. Il est issu d’un travail bipartite. Tout le monde tentera de s’en attribuer le mérite, et je pense qu’ils ont bien fait les choses. Le seul élément qui pourrait passer inaperçu concerne l’investissement à long terme dans les sciences, parce qu’on n’en voit pas les effets immédiatement. Nous en avons toutefois vraiment besoin pour que le pays puisse être concurrentiel à long terme, car il ne suffit pas de disposer des meilleures technologies. Il faut surtout, selon moi, avoir les connaissances scientifiques de pointe qui vont nous permettre de conserver notre suprématie dans ce secteur de la technologie.

Brian Levitt :

Je vous entends sans cesse parler d’investissement, et ce, malgré le fait que le gouvernement fédéral aura dépensé 6 000 G$ pour soutenir l’économie pendant la pandémie. Soulignons également que plusieurs investisseurs et personnes avec qui je discute se préoccupent de la nature des fonds dépensés. La dette nationale dépasse maintenant les 31 000 G$. Précisons que ces investissements ne se font pas tous en même temps. L’administration Trump n’a pas dépensé 4 000 G$ pas plus que le gouvernement de M. Biden a fait un chèque de 2 000 G$. Ces sommes sont déboursées sur une plus longue période. Pouvez-vous nous expliquer ça?

Andy Blocker :

Vous avez tout à fait raison. Tout d’abord, il faut distinguer les investissements des dépenses. La stratégie était de donner de l’argent aux gens pour qu’ils la dépensent rapidement et fassent rouler l’économie. Donc, sur la somme de 1 900 G$ ou 2 000 G$ annoncée par l’administration Biden en début de mandat, 1 000 G$ ont été distribués en six mois. Cette somme a donc contribué à l’inflation. Pardon, nous en observons les effets maintenant, mais il s’agit d’une grande somme qui a été dépensée très, très rapidement.

Brian Levitt :

Vous avez oublié de le dire à Jerome Powell.

Andy Blocker :

Exactement. Il était occupé à… Nous allons nous arrêter ici. J’en ai tellement à dire… Mais oui, les investissements n’ont pas un effet immédiat sur l’économie. On le voit en fin de compte et les projets de loi ne sont plus assortis de sommes aussi importantes. Je parle de la loi sur la réduction de l’inflation… Ça me fait drôle de le dire. En fait, cette loi, et les économistes seront en majorité d’accord avec cela, n’est pas aussi inflationniste que les autres. Voilà où je veux en venir. C’est vraiment une question d’investissement dans une perspective à long terme. Le projet de loi sur les infrastructures prévoyait également des dépenses à long terme. Comme nous en avons parlé, il s’échelonne sur un horizon de 10 ans. À mon avis, ce sont des investissements que nous devons faire dès maintenant. Je ne pense pas qu’ils alimenteront l’inflation. Au contraire, ils seront très avantageux à long terme.

Brian Levitt :

Jodi, cela me rappelle lorsque l’American Tax Payer Relief Act a fait augmenter mes impôts.

Andy Blocker :

Je ne veux même pas en entendre parler.

Jodi Phillips :

Oui, un beau moment.

Andy Blocker :

Je ne veux même pas savoir. J’habite dans un des états où l’exonération d’impôt des États et des municipalités (SALT) a été éliminée, ce qui a été très douloureux.

Brian Levitt :

Exactement.

Jodi Phillips :

Brian, est-ce le moment de poser à Andy la question à laquelle, j’en suis certaine, il préfère répondre?

Andy Blocker :

Non, ne me posez pas cette question.

Brian Levitt :

Allez, faites-le.

Jodi Phillips :

Que se passera-t-il en 2024? Qui sera candidat?

Andy Blocker :

L’année 2022 n’est même pas encore terminée. Pourquoi me posez-vous cette question? Allez. Bon, d’accord…

Jodi Phillips :

Vous êtes avec nous, donc je veux en profiter. Je veux être la première à savoir.

Brian Levitt :

Nous ne vous demandons pas ce à quoi vous voulez répondre, mais bien ce que nous voulons savoir.

Andy Blocker :

Mon problème est que je réponds à cette question. Alors, je veux bien vous dire ce que je répète depuis un an, et personne n’aime entendre, mais ça va. Je serai bien honnête avec vous.

Jodi Phillips :

Bon, vous dites toujours la même chose, c’est bien.

Andy Blocker :

Bon voilà. Je vais commencer par répondre à la question, ce qui va provoquer bien des soupirs et protestations, puis je vais vous expliquer pourquoi. Trump contre Biden. OK, et voici pourquoi.

Brian Levitt :

Vous protestez? Je n’ai rien dit.

Andy Blocker :

Vous n’avez pas protesté. Je pense que c’est le scénario de base. Je ne dis pas que c’est ce qui va se produire, mais si vous deviez parier aujourd’hui, ce seraient les deux candidats sur qui miser. Pourquoi? Parce que chacun d’entre eux peut décider de se porter ou non candidat. De fait, si Trump décide de se lancer dans la course à l’investiture du parti républicain, il est certain de l’emporter. Si M. Biden se porte candidat à l’investiture du parti démocrate, il est assuré de gagner, et c’est mon point de départ.

Andy Blocker :

Est-ce que certains facteurs pourraient les empêcher de se présenter? Oui, bien sûr, et il peut se passer beaucoup de choses d’ici là. Je tiens à préciser que, malgré toutes les enquêtes visant l’ancien président Trump, une mise en accusation ne pourrait pas l’empêcher de se porter candidat à la présidence ni de devenir président, contrairement à une condamnation. Il pourrait être mis en accusation, mais là encore, ça dépend de la vitesse à laquelle le système judiciaire pourrait intervenir. C’est pourquoi je dis que s’il se lance dans la course, il deviendra candidat, et je ne suis pas certain que toutes ces enquêtes peuvent y changer quoi que ce soit.

Andy Blocker :

En ce qui concerne M. Biden, je crois qu’il continue de tergiverser. Je veux dire qu’il a laissé planer le doute quant à sa candidature à quelques reprises au cours des dernières semaines. Nous verrons bien ce qui se passera en arrivant en 2024. Il ne confirmera pas ses intentions avant ce moment, mais s’il se présente, en tant que chef du parti démocrate, plusieurs candidats se présenteront contre lui. Comme Trump, il dispose d’une solide base d’appuis de 30 % à 40 % et ils en arriveront au même résultat. Alors, voilà.

Jodi Phillips :

D’accord.

Brian Levitt :

J’ai une dernière question à ce sujet, Andy, si ça te va. Projetons-nous en janvier 2025, le jour de l’investiture. Les résultats de l’élection sont contestés. Est-ce possible que nous ne sachions pas qui sera nommé président ce jour-là? Est-ce un risque? Bill Maher a longuement parlé de cette question lors de son spectacle où deux candidats se présentaient pour prêter le serment d’office.

Andy Blocker :

Je crois donc que c’est la raison pour laquelle le Sénat s’affaire à rédiger la loi sur le dépouillement des votes électoraux, la Electoral Count Act, pour éviter qu’une telle situation se produise. Ils y travaillent donc de façon bipartisane et tentent de s’assurer que le vice-président occupe une fonction honorifique et qu’il existe divers garde-fous à cet égard.

Jodi Phillips :

Ma prochaine question porte sur l’année 2028. Il vaut donc mieux mettre fin à cet entretien maintenant. Oui, mettons-y fin tout de suite. Andy, merci beaucoup de vous être joint à nous encore une fois et d’avoir répondu à toutes nos questions. Nous saurons assez rapidement à quoi nous en tenir.

Brian Levitt :

Merci, Andy.

Andy Blocker :

Très bien, c’est moi qui vous remercie.

Jodi Phillips :

Merci.

 

NA2560552

Renseignements importants

Date de l’enregistrement : 6 octobre 2022

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© Invesco Canada Ltée, 2022.

 

Les taux de participation aux élections de mi-mandat de 2018 proviennent de Roll Call.

 

Analyse historique de la moyenne Dow Jones des valeurs industrielles selon diverses compositions des partis au pouvoir d’après Bloomberg, L.P., et Strategas Research Partners, au 31 décembre 2021.

 

La moyenne Dow Jones des valeurs industrielles est un indice pondéré en fonction des cours des 30 titres des plus grandes sociétés cotées à la Bourse de New York comportant le plus grand nombre d’actionnaires.

 

Analyse historique des résultats des élections de mi-mandat aux États-Unis et de la cote de confiance à l’égard du président fondées sur les recherches d’Invesco.

 

Selon Real Clear Politics, la cote de confiance de Joe Biden était de 41 % en août 2022.

 

La citation de James Carville au sujet du marché obligataire a été répétée dans Bloomberg News le 29 janvier 2018.

 

Résultats du référendum au Kansas publiés par Reuters, au 3 août 2022

 

Résultats des élections spéciales à New York publiés par l’Associated Press en date du 24 août 2022.

 

Les données sur l’opinion des Américains à l’égard de la Chine proviennent du Pew Research Center en date du 29 juillet 2022.

 

Les renseignements sur les investissements dans la fabrication de semi-conducteurs d’Intel, de Micron et d’IBM proviennent des annonces des entreprises.

 

Les données sur les dépenses de soutien du gouvernement fédéral américain pendant la pandémie proviennent de Bloomberg News.

 

Les données sur la dette nationale des États-Unis proviennent du The New York Times en date du 4 octobre 2022.

 

L’OPEP désigne l’Organisation des pays exportateurs de pétrole.

 

L’acronyme SALT signifie State and Local Taxes ou l’impôt des États et des municipalités.