Actions des marchés émergents

Que se passe-t-il avec les actions chinoises?

What is going on with Chinese equities?
Points importants à retenir
Crise de confiance.
1

Nous croyons que la Chine traverse sa première crise de confiance marquante depuis la période de restructuration des années 1990.

Ralentissement de la croissance.
2

Dans un contexte de ralentissement de la croissance en Chine, nous nous attendons à voir une discipline plus concurrentielle, une meilleure répartition du capital et une consolidation croissante.

Sociétés attrayantes.
3

Le repli généralisé des actions chinoises au cours des dernières années présente des occasions considérables d’investir dans des sociétés structurellement attrayantes.

Selon nous, les périodes de disparités extrêmes sur les marchés sont souvent les plus lucratives. Aujourd’hui, les niveaux élevés d’incertitude macroéconomique et politique, ainsi que l’insécurité collective des investisseurs, ont engendré des disparités extrêmes entre les marchés boursiers. Les prix des actifs ne sont plus ce qu’ils étaient avant.

Les questions concernant la croissance mondiale (récession ou atterrissage en douceur?), l’inflation et les taux (poursuite du resserrement de la politique monétaire* ou pause?) et la situation géopolitique (détente entre les États-Unis et la Chine ou augmentation de l’hostilité?) ont perturbé les investisseurs. La réaction émotionnelle collective a été de se jeter dans les domaines perçus comme étant « sûrs », comme l’intelligence artificielle, l’Inde et, plus récemment, les titres de créance des marchés émergents (ME). Nous croyons qu’il y a sans doute des bulles dans certains de ces segments. De même, les domaines plus incertains, en particulier la Chine, ont été presque entièrement boudés.

À notre avis, il existe actuellement des occasions formidables en Chine. Dans ce commentaire, nous abordons les facteurs de la récente sous-performance et soulignons les domaines dans lesquels, selon nous, les sceptiques se concentrent sur les mauvaises questions.

La récente sous-performance a été frappante

Si l’on exclut la Chine, les rendements des marchés émergents ont été fantastiques récemment. Pour la période de trois ans qui s’est terminée le 30 juin 2023, l’indice Morgan Stanley Capital International marchés émergents hors Chine a enregistré un rendement de 32 % en dollars américains ($ US), soit presque le rendement du marché haussier de l’indice S&P 500 (44 %)1.

Au cours de la même période, l’indice Morgan Stanley Capital International marchés émergents en Chine a baissé de 32 %. Compte tenu de la pondération de 30 %2 de la Chine dans l’indice MSCI marchés émergents, cela a eu une incidence négative importante sur les rendements globaux des actions des marchés émergents.

Alors, quel est le problème de la Chine?

Il est clair que quelque chose se trame. On s’attendait généralement à ce que la Chine soit l’un des principaux marchés boursiers mondiaux en 2023, le pays ayant soudainement abandonné trois années de restrictions pandémiques draconiennes. Les investisseurs ont beaucoup misé sur sa reprise, l’indice CSI 300, qui regroupe les actions chinoises les plus importantes, a progressé de 20 % en dollars américains de novembre 2022 à janvier 20233.

Toutefois, les investisseurs se sont rapidement enfuis lorsque les signes de reprise se sont révélés décevants.

Que se passe-t-il réellement en Chine? Selon nous, la Chine traverse un choc existentiel inhabituel sur le plan de la confiance. En l’absence d’une réforme économique significative, elle connaîtra une croissance nominale plus faible.

La Chine traverse une crise de confiance

Par le passé, la Chine s’est démarquée parmi les marchés émergents. Son économie a été multipliée par 12, passant de 1 500 milliards de dollars à 18 000 milliards de dollars au cours des deux dernières décennies4! Cette période de croissance a été soutenue par un optimisme constant, une rareté dans le monde en développement. À l’instar des États-Unis, la Chine se caractérise par une confiance inébranlable dans son avenir.

Mais aujourd’hui, nous croyons qu’elle traverse sa première crise de confiance importante depuis la période de restructuration des années 1990. En l’absence d’une réforme économique majeure, nous nous attendons à ce que la croissance structurelle du produit intérieur brut (PIB) nominal de ce pays diminue.

Les inquiétudes se sont principalement manifestées par une réticence généralisée à investir dans des actifs à long terme.

  • Regardez le marché boursier : L’indice CSI 300 se situe sous les niveaux atteints en 2015 et sous les niveaux atteints au sommet du marché boursier en 20085!
  • Ou le secteur de l’immobilier : Les ventes de logements se sont effondrées et rien ne laisse entrevoir une reprise importante, malgré les taux hypothécaires qui n’ont jamais été aussi bas.
  • Ou les dépenses en capital : Les investissements du secteur privé demeurent en grande partie en grève, les entreprises cherchant à consolider leur bilan et à réduire leurs coûts.
  • Ce qui est peut-être le plus frappant est la chute spectaculaire de la formation des familles, qu’il s’agisse des mariages ou des naissances, ce qui représente sans doute l’investissement de plus longue durée pour les particuliers.

Les craintes d’une bulle de la dette ou d’une bulle immobilière sont mal placées.

Il n’est pas clair si ces inquiétudes sont temporaires ou plutôt existentielles. Néanmoins, nous croyons que les sceptiques à long terme à l’égard de la Chine se concentrent sur le mauvais ensemble de problèmes : la dette et le logement. Les prédictions d’un moment « Minsky »** frappant ce pays sont, à notre avis, complètement erronées. La Chine n’est pas aux prises avec une bulle de la dette qui ferait chuter l’économie. Et elle n’a pas de bulle immobilière démesurée.

  • Le boom de la dette en Chine est terminé depuis longtemps. Même si sa dette intérieure a augmenté à un rythme alarmant il y a 15 ans lorsque les décideurs ont réagi face à la grande crise financière de 2009, elle n’a pas augmenté globalement depuis très longtemps. En fait, les niveaux d’endettement se sont stabilisés par rapport au PIB nominal au cours des sept à huit dernières années. Les entreprises avaient procédé à un important désendettement au cours de cette période et les décideurs s’étaient concentrés presque exclusivement sur la stabilité financière au détriment de la croissance.
  • Le boom immobilier en Chine a atteint un sommet il y a près de dix ans. Au cours des dix dernières années, le volume des ventes de logements n’a pas augmenté. Et même si les prix à long terme à l’échelle nationale ont été stupéfiants au cours des 20 dernières années – et ont créé beaucoup de richesse en cours de route –, les gains des prix de l’immobilier au pays ont été nettement inférieurs à la croissance des revenus nominaux disponibles. Il est donc peu probable que la Chine connaisse un effondrement généralisé du secteur immobilier qui déclencherait une crise « Minsky ».

Le ralentissement structurel de la croissance macroéconomique est presque inévitable

Cela ne veut toutefois pas dire que la baisse des ventes de logements n’aura pas d’incidence structurelle sur la croissance économique. En fait, c’est ce que nous observons depuis les cinq à dix dernières années. Comme nous le disons depuis longtemps, le véritable problème de la Chine est la nécessité de trouver un nouveau modèle de croissance pour compenser les effets structurels des sommets des exportations et du marché de l’habitation, qui ont été les deux principaux moteurs de croissance économique au cours du dernier quart de siècle. C’est le véritable défi pour les décideurs.

Nous entrevoyons quelques solutions possibles, notamment la redistribution (élargissement du mince filet de sécurité sociale de la Chine) et le développement des marchés financiers chinois inactifs. Ces deux facteurs augmenteraient considérablement la consommation, l’investissement et la productivité à l’échelle du pays. Mais ni l’un ni l’autre de ces facteurs ne semble actuellement être une priorité pour les décideurs.

Nous nous attendons tout de même à ce que la croissance chinoise soit de meilleure qualité

En l’absence d’une réforme économique à long terme plus réfléchie, nous nous retrouverons avec une croissance plus lente de la Chine, en accord avec le reste du monde. Dans un contexte de ralentissement de la croissance dans ce pays, nous nous attendons à voir une discipline plus concurrentielle, une meilleure répartition du capital et une consolidation croissante. Tous ces facteurs sont propices à l’amélioration du rendement du capital pour les chefs de file du secteur.

De plus, nous croyons qu’un ralentissement de la croissance n’empêche pas les occasions de placement, car, comme dans le reste du monde, la Chine compte un certain nombre de sociétés structurellement attrayantes qui, selon nous, présentent des caractéristiques d’une croissance et d’un avantage concurrentiel durables, d’une solide gouvernance et d’une foule d’options réelles intégrées dans leurs franchises.

Étude de cas : H World et l’industrie hôtelière chinoise

Notre équipe entrevoit d’importantes occasions au sein d’un groupe restreint de sociétés structurellement attrayantes. C’est le cas de H World, le principal exploitant d’hôtels en Chine6. L’énorme industrie hôtelière de la Chine compte 361 000 propriétés7, comparativement à 56 000 aux États-Unis8. Toutefois, elle est fragmentée anormalement. Les chaînes d’hôtels de marque ne représentent que 35 % de l’ensemble des chambres d’hôtels9 alors que ce nombre s’élève à 72 % pour les États-Unis et à 41 % pour la moyenne mondiale10.

H World exploite l’un des plus importants réseaux hôteliers en Chine, avec plus de 8 500 hôtels et un arsenal bien développé de 25 marques, allant des options à faible coût aux options haut de gamme11. Compte tenu de l’avantage concurrentiel important de ses marques, nous entrevoyons d’importantes occasions pour que H World consolide le marché, en particulier grâce à un programme d’adhésion et de fidélisation de 199 millions de membres12. Nous prévoyons que H World développera son réseau d’hôtels franchisés à un taux composé à deux chiffres au cours des dix prochaines années. Cela fait suite à une augmentation de 45 % du nombre de chambres d’hôtel de H World au cours des trois dernières années, pour atteindre près de 800 000 chambres à la fin de l’année 202213. En revanche, nous estimons que le nombre total de chambres d’hôtel en Chine a diminué de plus de 17 % depuis 201914.

L’épine dorsale de la stratégie de croissance réussie de H World repose sur l’économie des franchisés. La société offre des rendements nettement supérieurs aux franchisés grâce à sa distribution inégalée (coûts de marketing inférieurs et taux d’occupation plus élevés), à son portefeuille de marques attrayant (prix supérieurs) et à ses activités et technologies supérieures (coûts d’exploitation plus faibles). Les dommages économiques causés par la pandémie ont amplifié la nécessité pour les propriétaires de se convertir à des réseaux de marques comme H World. Il est important de noter que les plans d’expansion soutiennent un changement structurel de la composition du portefeuille de H World vers les segments de taille moyenne et supérieure, ce qui pourrait entraîner une hausse des tarifs moyens (les chambres de taille moyenne à haut de gamme sont passées de 30 % du nombre total des chambres en 2018 à plus de 50 % en 2022)15.

Nous nous attendons à ce que la combinaison de la croissance du nombre de chambres, de la hausse des tarifs et d’une reprise cyclique de l’occupation se traduise par une forte croissance des revenus au cours des cinq prochaines années. L’entreprise H World dispose d’un énorme levier d’exploitation, car la presque totalité de la croissance future de son réseau devrait provenir de l’expansion des franchises. Par conséquent, nous nous attendons à une forte augmentation des marges d’exploitation et de production et des flux de trésorerie disponibles.

Conclusion

Comme les investisseurs chevronnés des marchés émergents le savent, les périodes extrêmes peuvent présenter des occasions pour les plus patients. De nos jours, les marchés sont fortement polarisés. La « certitude » macroéconomique est évaluée de manière exceptionnellement serrée et les valorisations paraissent exceptionnellement intéressantes dans les zones d’incertitude, en particulier en Chine. Nous sommes d’avis que le repli généralisé des actions chinoises au cours des dernières années présente des occasions considérables d’investir dans des sociétés structurellement attrayantes, dotées d’une croissance et d’un avantage durables, à des valorisations inhabituellement intéressantes.

 

Notes de bas de page

  • 1

    Source : FactSet, au 2023-06-30

  • 2

    Source : Bloomberg, au 2023-06-30

  • 3

    Source : Bloomberg, du 2022-10-31 au 2023-01-30

  • 4

    Source : Banque mondiale, de 2002 à 2022. Mesurée avec le produit intérieur brut nominal en dollars américains.

  • 5

    Source : Bloomberg, au 2023-12-07

  • 6

    Source : La société représentait 3,7 % du Fonds de marchés en développement Invesco au 30 mai 2023

  • 7

    Source : Chinese Hospitality Association, au 2022-12-31

  • 8

    Source : JP Morgan, en date de juin 2023

  • 9

    Source : Chinese Hospitality Association, au 2022-01-01

  • 10

    Source : JP Morgan, en date de juin 2023

  • 11

    Source : H World Annual Report 2022

  • 12

    Source : H World Annual Report 2022

  • 13

    Source : H World Annual Report 2022

  • 14

    Source : Morgan Stanley, en date d’août 2022

  • 15

    Source : H World Annual Report 2022

  • *

    Hausse des taux d’intérêt par les banques centrales

  • **

    Le début d’un effondrement du marché provoqué par l’activité spéculative insouciante alimentée par l’accumulation des dettes