Marchés et économie

Conversations sur les marchés : Le pouls de mi-année sur les marchés

Conversations sur les marchés : Le pouls de mi-année sur les marchés

La première moitié de l’année a été marquée par des hausses des taux d’intérêt, des faillites bancaires, ainsi que par les inquiétudes provoquées par le plafond de la dette américaine. Pourtant, l’économie s’est montrée exceptionnellement résiliente. Kristina Hooper et Alessio de Longis se joignent à nous à l’occasion de cet épisode de Conversations sur les marchés pour nous parler des perspectives de placement d’Invesco de mi-année, notamment de l’obsession à l’égard d’une récession, de la trajectoire des taux d’intérêt, et de leurs réflexions quant aux actions, aux titres à revenu fixe et à l’immobilier.

Voici les principaux points que je retiens :

  • On peut raisonnablement s’attendre à une récession, mais selon nos invités, il semblerait que plusieurs catégories d’actifs en tiennent déjà compte.
  • Durant le premier semestre, le marché boursier américain a été propulsé par les mégacapitalisations de qualité du secteur des technologies de l’information, tandis que les titres cycliques et de valeur ont accusé du retard. Il arrive que le marché se comporte ainsi, mais une telle progression n’est généralement pas annonciatrice d’un nouveau cycle.
  • Néanmoins, selon Alessio, les investisseurs risquent de passer la deuxième moitié de l’année à attendre une récession qui ne viendra pas. La décélération de l’inflation est rassurante pour les marchés. Ce scénario permettra sans doute aux marchés d’afficher encore une belle tenue au cours des trois à six prochains mois, car les investisseurs en ont tout simplement marre de composer avec le spectre d’une récession.

Transcript

Brian Levitt:

Bonjour, je m’appelle Brian Levitt.

Jodi Phillips:

Et moi, Jodi Phillips. Aujourd’hui, nous allons parler des perspectives de mi-année, et c’est pourquoi Alessio et Kristina sont de retour. Kristina Hooper est stratège en chef des marchés mondiaux d’Invesco, et Alessio de Longis est chef des placements de l’équipe d’Invesco Investment Solutions. Brian, nous en sommes déjà à la mi-année.

Brian Levitt:

Le temps passe vite, n’est-ce pas?

Jodi Phillips:

Oui, trop vite.

Brian Levitt:

L’année scolaire est déjà presque terminée. Nous devrons continuer à travailler tout l’été, mais les enfants semblent plutôt ravis. Heureusement, l’hiver n’a pas été si rude ici, dans le nord-est. Nous nous en sommes sortis indemnes.

Jodi Phillips:

Oui. L’hiver a aussi été plutôt clément sur la côte du golfe du Mexique.

Brian Levitt:

Oui, vraiment. Peut-être qu’un jour, j’aurai aussi la chance de vivre dans le sud.

Jodi Phillips:

N’oubliez pas que la température devrait atteindre les 99 degrés cette semaine, donc les conditions ne sont pas toujours parfaites. Ce qui nous intéresse toutefois ici ce sont les conditions des marchés, et je pense qu’elles ont été plus favorables que prévu au cours de la première moitié de l’année. Un peu à l’image de votre hiver. N’est-ce pas Brian?

Brian Levitt:

En effet, je pense que vous avez raison. Plusieurs investisseurs à qui j’ai parlé m’ont dit qu’ils tentent d’analyser ce qui s’est passé l’année dernière à la lumière de cette année. L’année dernière a été marquante en raison de l’importante détérioration des conditions, au chapitre des attentes, de l’inflation et du resserrement de la politique monétaire. Vous vous souvenez de tout cela? L’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Jodi Phillips:

Oui, je m’en souviens.

Brian Levitt:

Oui. Cette année, la situation semble s’améliorer, petit à petit. L’inflation est en baisse, la Fed est probablement arrivée à la fin ou proche de la fin de son cycle de resserrement et l’économie s’est montrée résiliente, ce qui a rassuré le marché.

Jodi Phillips:

Oui. Et n’oublions pas que, malgré tout le drame qui s’est joué jusqu’à la dernière minute, le plafond de la dette a été relevé sans anicroche.

Brian Levitt:

Tout à fait.

Jodi Phillips:

C’était une belle façon de souligner le milieu de l’année. Avant que le plafond de la dette n’attire autant l’attention, nous étions tous préoccupés par les faillites bancaires qui ont eu lieu au cours du printemps. Maintenant, les décideurs semblent avoir réussi à gérer la situation et à éviter le genre de problèmes financiers qui ont tendance à se produire à la fin du resserrement de la politique monétaire. Qu’en pensez-vous?

Brian Levitt:

Oui, du moins jusqu’ici. C’est étrange à quel point nous avons la capacité d’oublier les événements que vous venez de mentionner? C’est un rappel que nous avons tendance, les investisseurs et les gens, en général, à nous inquiéter rapidement lorsqu’un événement se produit et à passer tout aussi rapidement à autre chose une fois que c’est terminé. C’est comme si nous nous disions : « Je savais bien que tout finirait par bien aller. », mais en étions-nous certains? Oui.

Jodi Phillips:

Voici ce qui s’est passé, c’est fini, passons à autre chose.

Brian Levitt:

Exactement.

Jodi Phillips:

Comment le marché s’est-il comporté pendant tout ce temps?

Brian Levitt:

Je dirais que le début de l’année, et je sais qu’Alessio en parlera, a pris l’allure d’un atterrissage en douceur. La participation était généralisée sur les marchés, et tout se passait comme si l’économie se portait bien. Dernièrement, le marché a été dominé par une poignée de titres, ce qui peut être aussi un indice de la santé de l’économie. Comme on dit, ça sent le roussi... Je dirais qu’une amélioration de l’activité économique pourrait toutefois remettre l’ensemble du marché sur les rails.

Jodi Phillips:

Ça sent le roussi... Qu’est-ce que ça veut dire? C’est une analogie? Pouvez-vous expliquer?

Brian Levitt:

Il s’agit seulement d’une expression pour dire que les choses pourraient se gâter.

Jodi Phillips:

Ah, j’aime bien ce genre d’expressions. De toute évidence. Dans l’intérêt de notre public, il vaudrait mieux passer à autre chose.

Brian Levitt:

En effet. Ne nous attardons pas ici.

Jodi Phillips:

Oui. Laissons les expressions de côté. Maintenant que nous avons fait le tour de la question, nous n’avons plus de temps à perdre.

Brian Levitt:

En effet.

Jodi Phillips:

Nous avons bien d’autres sujets à couvrir. Il est temps de laisser la parole à Kristina et Alessio. Bienvenue!

Kristina Hooper:

Merci de nous avoir invités.

Alessio de Longis:

Oui, merci Jodi et Brian, c’est toujours un plaisir de vous retrouver.

Brian Levitt:

Avez-vous d’autres expressions à partager avec nous ou pouvons-nous simplement commencer à poser des questions?

Kristina Hooper:

Je me creusais justement la tête pour trouver quelque chose à ajouter, mais je passerais mon tour.

Jodi Phillips:

Ne les plongez pas dans l’embarras.

Brian Levitt:

Vous avez raison. Allez-y.

Jodi Phillips:

Oui, nous avons passé en revue quelques faits saillants et moins saillants du premier semestre. Alors, Kristina, pouvez-vous nous faire un bref compte-rendu de vos impressions?

Kristina Hooper:

Bien sûr. Le premier semestre a été très différent de l’année 2022 que l’on pourrait qualifier d’annus horribilis, pour emprunter les mots de la Reine Elizabeth. Tous les marchés boursiers ont inscrit des gains, à l’exception de l’imposant marché chinois. On peut donc dire que le contexte a été plutôt favorable, même si de toute évidence seulement une poignée de secteurs est à l’origine des gains du marché américain. Un des faits saillants qui, à mon avis, est passé sous le radar est la performance du marché boursier japonais. Les actions japonaises se sont envolées. L’indice Nikkei 225 a terminé la période à un sommet inégalé depuis 1990, et a inscrit un rendement nettement supérieur à 20 % cette année. Il se produit beaucoup de choses, certainement en grande partie en raison de la politique monétaire. La BdJ (Banque du Japon) se distingue bien entendu en maintenant sa politique hautement expansionniste.

Brian Levitt:

C’est aussi un rappel qu’un soupçon d’inflation comme au Japon peut changer la donne et soutenir la croissance nominale.

Kristina Hooper:

Ce qui n’est pas mauvais en soi.

Brian Levitt:

Et favoriser la rentabilité. Alessio, avez-vous été étonné par ce que l’on pourrait qualifier, si l’on reprend la formule utilisée par les médias, de résilience de l’économie?

Alessio de Longis:

C’est vraiment remarquable. Malgré le contexte, à savoir le cycle de resserrement le plus rapide que l’on ait vu, les risques d’autres faillites bancaires et, par conséquent, le resserrement des conditions de crédit, l’allure de la courbe des taux qui n’a jamais été aussi plate ni inversée depuis les années 1970, ainsi que tous les autres signaux annonciateurs de récession, l’économie se comporte de façon extraordinaire, comme en témoigne le taux de chômage qui se situe à des creux inégalés, non seulement aux États-Unis, mais aussi dans la zone euro. Au Royaume-Uni, l’économie est demeurée étonnamment résiliente. La situation reflète vraiment l’ampleur de la demande accumulée et à quel point les marchés de l’emploi étaient serrés.

Nul doute que la poussée d’inflation que nous avons observée l’année dernière est attribuable aux fondamentaux. Il n’est pas seulement question ici de chaînes d’approvisionnement et de cycle des stocks, n’est-ce pas? La vigueur du marché de l’emploi à ce jour vient confirmer dans quelle mesure elle a contribué à l’inflation en 2022. Nous voyons aussi à quel point l’inflation se résorbe lentement en raison de la vigueur des marchés de l’emploi encore aujourd’hui. En effet, je crois que l’économie se porte nettement mieux que nous l’aurions cru il y a un an.

Jodi Phillips:

Que pensez-vous des risques de récession aux États-Unis? D’ailleurs Kristina, j’ai lu dans l’un de vos récents articles que vous en parliez comme étant une obsession à l’égard de la récession. Lorsque vous disiez que vous cherchiez une expression, je me suis rappelée de votre analogie avec les zombies, dont vous vous êtes servie pour illustrer les contrecoups de la politique de la banque centrale et du resserrement de la Fed sur l’économie, les appréhensions de ces gens qui attendaient de voir ce qui allait se passer et les spéculations entourant le risque de récession. Qu’en pensez-vous et à quoi vous attendez-vous?

Kristina Hooper:

Nul doute que la conjoncture économique est franchement inhabituelle, car le marché de l’emploi est serré. Cette situation est à la fois une bénédiction et une calamité, car elle a sans aucun doute engendré un contexte où l’inflation est élevée, comme Alessio l’a souligné, à juste titre. Il s’agit d’un important facteur, mais c’est aussi la raison pour laquelle l’économie demeure si résiliente. Ça me fait penser au chef de la direction de United Airlines qui soulignait la semaine dernière à quel point la demande de la clientèle touristique est extrêmement forte. La demande de la clientèle d’affaires n’a pas encore totalement repris. Nous sommes probablement dans une légère récession ou dans une période de croissance modérée de l’économie. Aux États-Unis, je crois que la récession touche les entreprises, mais que les consommateurs s’en tirent bien, comme en témoigne la vigueur de la consommation.

À mon avis, cette affirmation illustre bien la conjoncture économique unique dans laquelle certains secteurs sont en forte progression, notamment la consommation qui représente un très grand pan de l’économie, mais où d’autres secteurs éprouvent des difficultés. Nous attendons toujours l’ensemble des répercussions de la politique monétaire qui tardent à se manifester, tout comme il faut un certain temps à la victime d’un zombie pour se transformer, car il existe un important décalage entre le moment où la politique est mise en œuvre et le moment auquel elle produit ses effets sur l’économie réelle.

Brian Levitt:

C’est exactement la question que j’allais vous poser. Alessio, vous parlez souvent du décalage entre la politique monétaire et ses répercussions. Il y a 1 an, le taux des fonds fédéraux était de 1,00 %, je crois? Un resserrement colossal a été opéré depuis, de quelque 425 points de base. Compte tenu de tous les facteurs susceptibles de provoquer une récession dont vous avez parlé, cela vous donne-t-il toujours des raisons de vous inquiéter vu l’ampleur du resserrement? Devons-nous encore nous attendre à un ralentissement de l’économie ou à frôler la récession, ici, aux États-Unis?

Alessio de Longis:

Lorsqu’on analyse les données historiques, on peut constater a priori que les effets de la politique monétaire sont incertains et très variables, n’est-ce pas? De 12 à 24 mois plus tard, on peut s’attendre avec certitude à observer les répercussions de la politique monétaire sur l’économie. Cela signifie que nous entrons dans la période critique pour ainsi dire.

Brian Levitt:

Effectivement.

Alessio de Longis:

Cela dit, notre génération semble quelque peu obsédée à mon avis par la récession en raison des deux dernières qui ont ni plus ni moins provoqué des implosions. Il ne s’agissait pas que de simples récessions, mais bien de crises financières. La catastrophe, n’est-ce pas? En 2008 et en 2020, la situation nécessitait de sortir l’artillerie lourde, de baisser les taux jusqu’à ce qu’ils deviennent nuls ou négatifs et de mettre en place un programme d’assouplissement quantitatif en plus de déployer tout un train de mesures. Je crois que c’est vraiment ce qui est à l’origine de l’obsession à l’égard d’une récession. Pour en revenir au point mentionné par Kristina, le consommateur a grandement réduit ses dettes, sans oublier que la consommation représente encore 70 % de l’économie. Du côté des entreprises, une grande part de la réglementation a également permis d’éviter que leur endettement ne se répercute dans l’ensemble du système et ne provoque une récession destructrice comme nous avons connu, n’est-ce pas?

Est-il encore à propos d’anticiper une récession? Oui, absolument. Devrions-nous être obsédés par ce risque au point de nous empêcher de prendre des décisions de placement ou de conserver tous nos investissements? Absolument pas. Le cours de plusieurs catégories d’actifs tient déjà compte, à mon avis, du fait que le risque de récession est gérable, pour ainsi dire. Brian, je ne sais pas si ça répond à votre question, mais je dirais que nous nous attendons toujours à ce qu’il y ait une récession, mais qu’il ne faudrait pas en faire une obsession qui nous empêche de prendre de bonnes décisions de placement.

Brian Levitt:

Non seulement vous répondez à ma question, mais votre façon de répondre a dépassé mes attentes. L’année 1991, que tout le monde ici a vécue, m’est également revenue en tête pendant que vous parliez. Bon, j’étais encore au secondaire, mais je me souviens des difficultés causées par la récession et des faillites bancaires, mais je me souviens aussi que le marché boursier s’en est tiré sans trop de mal dans l’ensemble. Il s’agit donc d’un parallèle intéressant. Or, pendant que vous parliez, je me demandais aussi pourquoi la Fed avait encore l’intention de relever les taux d’intérêt. Peut-être pourrez-vous m’éclairer à ce sujet? Le resserrement a été tellement considérable au cours d’une si courte période, que je me pose des questions. Je les relance jour après jour, mais ils ne répondent pas à mes appels. Est-ce possible de cesser de relever les taux, s’il vous plaît?

Kristina Hooper:

Le fantôme de Paul Volcker fait planer le spectre d’un enracinement profond de l’inflation. Je crois que la crainte vient du fait que nous n’avons pas vu un tel niveau d’inflation depuis tellement longtemps. Il est maintenant facile de comprendre comment nous en sommes rendus à ce point, mais je crois que la Fed veut tellement éviter de reproduire les erreurs qu’elle a commises il y a plusieurs années qu’elle préfère écouter le fantôme de Volcker pour intervenir dans certains secteurs de l’économie.

Jodi Phillips:

Bon, situons maintenant notre discussion dans le temps? La présente conversation est enregistrée à l’aube de la réunion de juin de la Fed et l’on pourrait croire que la plupart des auditeurs l’écouteront seulement après la réunion. À l’approche de la réunion de juin, mais surtout de la deuxième moitié de l’année, à quoi vous attendez-vous? D’autant plus que la Banque du Canada et la Banque de réserve d’Australie nous ont quelque peu pris par surprise récemment. Alors, où croyez-vous que tout cela pourrait nous mener au deuxième semestre?

Kristina Hooper:

Je vais commencer, si vous le permettez. Bien, Jodi, ça tombe bien, car nous avons mené un sondage sur LinkedIn la semaine dernière. Nos lecteurs ont dit s’attendre à une pause cette semaine et je suis d’accord avec eux. Je crois par ailleurs que la Fed gardera une position ferme, en évitant de se faire rassurante de façon à placer une épée de Damoclès au-dessus des marchés pour tenter de calmer les attentes quant à un assouplissement des conditions financières.

Encore plus important, à mon avis, sera le contenu du sommaire des projections économiques. J’ai hâte de voir les projections illustrées par le graphique à points qui, en plus du taux final, montre le moment où des baisses des taux d’intérêt sont prévues, car il s’agit de la plus grande question qui préoccupe les marchés à l’heure actuelle.

Brian Levitt:

Une pause ponctuelle, puis permanente. On pourrait s’imaginer danser sur « Stop ou encore ».

Kristina Hooper:

Je vais aller écouter la chanson et je vous reviens là-dessus.

Brian Levitt:

Alessio, dans votre analyse de ces marchés, vous avez souvent parlé de l’atterrissage en douceur du début de l’année, j’en ai d’ailleurs glissé un mot dans mon introduction, puis de la performance qui est circonscrite à l’heure actuelle à une poignée de secteurs du marché. Selon vous, à quoi pourrait ressembler la trajectoire à court terme de l’économie? Quelles sont vos impressions sur le plan tactique?

Alessio de Longis:

Bien, je crois que nous devons toujours tenir compte des fluctuations des cours, n’est-ce pas? Dans mon analyse de la fluctuation des cours, je crois qu’il faut se demander si le rendement du marché depuis le début de l’année, en particulier aux États-Unis, car ce n’est pas le cas ailleurs, est vraiment l’apanage de 10 sociétés. Il s’agit ici des mêmes sociétés à mégacapitalisation de qualité du secteur des technologies. Toute chose étant égale par ailleurs, une remontée alimentée par ce genre d’actions défensives, qui sont des titres de qualité, s’apparente davantage à une remontée défensive qu’à une remontée propulsée par les titres ou les secteurs cycliques de l’économie qui sont risqués et dont la valeur peut souvent être déformée. Les titres cycliques sont ceux qui tirent de l’arrière. Les marchés qui présentent un levier d’exploitation plus élevé au cycle mondial, tout comme les petites et les moyennes capitalisations tirent de l’arrière. Alors, qu’en est-il

Brian Levitt:

du secteur des services financiers?

Alessio de Longis:

Oui, les services financiers aussi accusent du retard. On peut comprendre vu l’inversion de la courbe des taux? On peut se demander à quel point les banques devront pousser le risque sur la courbe des taux pour obtenir un écart positif. Cela me fait penser à une remontée qui n’est pas annonciatrice d’un nouveau cycle. Qu’en pensez-vous?? Habituellement, ce sont les titres cycliques qui mènent au début du cycle, tout comme les titres de valeur et les petites capitalisations, mais on sait néanmoins qu’il s’agit d’une remontée. Selon moi, on pourrait assister durant la deuxième moitié de l’année à une quelconque répétition de ce qui s’est produit en novembre dernier où les investisseurs ont longuement attendu une récession qui n’est jamais venue. Les autorités monétaires ont alors pris une pause qui a été saluée par les marchés. Bref, l’inflation ralentit plus rapidement que la croissance, n’est-ce pas? Les marchés pourraient ainsi afficher encore une belle tenue au cours des trois à six prochains mois, car les investisseurs en ont assez de composer avec le spectre d’une récession.

L’année 2023 pourrait être celle où l’on attend Godot, qui n’arrivera jamais, et au cours de laquelle les marchés des actions et des titres à revenu fixe offrent de solides rendements entre 6 et 14 %. Vous vous demandiez s’il fallait adopter une stratégie excessivement tactique ou toute autre approche qui permettrait de composer avec ce genre de conditions de marché. Nous l’avons souvent répété, mais dans ce genre de conditions de marché, si vous privilégiez les titres de premier ordre, vous pourrez sans doute obtenir des rendements de 5,5 %, ou de 6 % à très faible volatilité, voire des rendements plus élevés. En ce moment, des rendements de 8 ou 9 % tout en maintenant une très très faible volatilité s’apparentent aux rendements boursiers, mais assortis d’un profil de risque nettement plus attrayant. Ce sont les placements assortis d’un tel profil qui vous permettent vraiment d’attendre de voir la direction que prendra le cycle.

Jodi Phillips:

Alors Alessio, bien sûr, une chose que l’on constate est que bien des investisseurs investissent leur argent dans les marchés monétaires en attendant, n’est-ce pas? Le solde des marchés monétaires a atteint des sommets inégalés. Que pensez-vous des épargnants qui ont choisi d’investir beaucoup d’argent dans les marchés monétaires en attendant patiemment de trouver la prochaine combine? Quel message avez-vous à leur transmettre?

Alessio de Longis:

Nous n’avons pas vu de tels rendements à court terme au cours des 20 dernières années, ce qui est bien sûr extrêmement tentant, n’est-ce pas? Mais, lorsqu’on regarde de plus près les rendements annualisés, on se rend compte qu’ils seront difficiles à atteindre si vous ne conservez pas vos placements pendant plusieurs années. Ce que je veux dire par là est qu’il faut tenir compte du risque de réinvestissement. Si vous cherchez à allonger un peu la duration et à accroître les écarts de taux, vous pouvez obtenir des rendements beaucoup plus élevés tout en réduisant un peu le risque de réinvestissement. À mon avis, ça dépend toujours de l’horizon de placement. Bien sûr, cette stratégie a donné de bons résultats au cours des six derniers mois, mais la question du risque de réinvestissement se pose à un certain moment.

Brian Levitt:

Devrions-nous maintenant parler des actions?

Kristina Hooper:

Bien sûr.

Alessio de Longis:

Bien sûr.

Brian Levitt

Kristina, allons-y. Un ajustement des évaluations a eu lieu l’année dernière. La croissance des bénéfices a ralenti, mais pas autant que celle de l’économie comme plusieurs personnes s’y attendaient je crois. Devons-nous nous attendre à un nouvel ajustement des bénéfices et des évaluations qui justifierait le recul des bénéfices prévu?

Kristina Hooper:

Nous allons certainement voir une détérioration des bénéfices, mais il est important de comprendre à mon avis que cette détérioration s’accompagne généralement d’un recul des rendements, ce qui a tendance à faire augmenter les multiples. Ce sont des forces qui peuvent s’opposer. Donc, si vous cherchez à savoir si nous allons atteindre les creux qui ont été touchés l’année dernière, je vous répondrais que cette possibilité est minime vu le contexte actuel. Bien sûr, le marché boursier pourrait subir certaines pressions à quelques reprises durant l’année, mais je pense qu’un recul des rendements devrait faire grimper les multiples, ce qui constituera un facteur déterminant.

Jodi Phillips:

Alessio, pouvez-vous nous partager certaines de vos observations sur le marché boursier en ce qui a trait aux capitalisations, aux styles et aux régions? Par exemple, comparer le marché américain et le marché international ou même les marchés émergents. Quels sont les segments que vous suivez de près à l’heure actuelle et dans lesquels croyez-vous pouvoir y repérer des occasions?

Alessio de Longis:

Comme les risques cycliques sont toujours à la baisse à l’égard des points que nous venons tout juste d’aborder, alors que les risques structurels sont plus élevés, je crois qu’il serait avantageux de commencer à privilégier de plus en plus les actions internationales. Nous avons parlé du dollar et de l’évaluation du dollar, mais il est important de se rappeler qu’en plus d’avoir une incidence sur la monnaie dans laquelle les placements sont libellés, une évaluation élevée du dollar reflétera également la faiblesse de l’évaluation de la devise japonaise et de l’euro, et c’est la faible évaluation de ces monnaies qui a réellement fait grimper les rendements boursiers en monnaie locale. Comme vous l’avez mentionné, nous avons constaté contre toute attente à quel point les rendements ont été forts du côté de l’Europe au cours des six à douze derniers mois, et c’est maintenant au tour du Japon de se distinguer à cet égard. Ces marchés boursiers offrent tous des rendements très intéressants, tant en monnaie locale que sur le plan des évaluations des devises.

C’est aussi un point important à mon avis, après une période de 15 ans dominée par les marchés américains, sachant que les cycles régionaux ont tendance à durer entre 10 et 15 ans environ. Il s’agit d’un thème important sur lequel les investisseurs peuvent commencer à mettre en œuvre de façon systématique, surtout pour ceux dont le portefeuille est composé de titres américains. Ils chercheront alors à réduire la pondération de ces titres en faveur des actions internationales. Cette stratégie ne doit pas prendre en compte de façon exagérée la prochaine hausse de taux de la Fed ni les prochaines données sur l’inflation. Vous pouvez mettre en œuvre cette stratégie de façon méthodique de façon à accroître la diversification de votre portefeuille sur le plan régional et éviter la concentration dans les mégacapitalisations de qualité dont nous avons parlé et qui sont omniprésentes dans presque toutes les composantes d’actions américaines à l’heure actuelle.

Brian Levitt:

Le moment est-il venu pour nous de parler du cycle circadien? Kristina, le ton de notre conversation est plutôt encourageant, même si nous sommes conscients de certains risques qui pourraient menacer l’économie. Y a-t-il des éléments qui vous empêcheraient de dormir?

Kristina Hooper:

Je ne peux pas vous dire que quoi que ce soit m’empêche de dormir, car je crois qu’en investissant à long terme, vous pouvez tolérer tous les épisodes de volatilité.

Brian Levitt:

Tout à fait, regardez à quel point nous avons réussi à nous tirer d’affaire depuis que nous avons entendu les mots COVID ou Coronavirus 19 pour la première fois.

Kristina Hooper:

Exactement. Or, ce qui m’inquiète, et ce, depuis la crise financière mondiale, est le fait que certaines personnes ont tendance à avoir peur des conditions de marché, réalisent des pertes, quittent le marché boursier en période de baisse, attendent sur les lignes de côté sans savoir à quel moment revenir, et ratent une grande partie de la forte remontée. C’est certainement arrivé l’automne dernier. De nombreux investisseurs effrayés ont fui les marchés pour attendre sur les lignes de côté. Ils ont probablement réalisé un rendement légèrement supérieur, mais je doute qu’ils ne réussissent à réintégrer le marché pour profiter des excellents rendements enregistrés depuis. C’est sans doute ma plus grande crainte à l’égard des investisseurs. Pour ce qui est des conditions macroéconomiques et des pièges qui pourraient se présenter, c’est l’immobilier commercial qui suscite des craintes, à juste titre, selon moi.

L’examen de cette catégorie d’actif m’indique toutefois que certains facteurs lui sont favorables. Les politiques de retour au bureau m’indiquent que les taux d’occupation ont déjà atteint des creux. Ils ne peuvent que remonter à partir de maintenant. Sans oublier que l’immobilier commercial va bien au-delà des bureaux. Un bon nombre des autres segments de la catégorie se portent plutôt bien. Bien sûr, les prêts pour les immeubles commerciaux qui viennent à échéance et qui ont besoin d’être refinancés suscitent certaines craintes, mais ils arriveront en grande majorité à échéance à la fin de 2024, en 2025 et en 2026. À ce moment-là, les taux d’intérêt et les conditions de crédit pourraient être bien différents. Je pense donc que les craintes obsessives à l’égard d’une situation qui pourrait se produire dans les prochaines années sont injustifiées pour le moment.

Brian Levitt:

Alessio, voici une question semblable et que j’aimerais commenter. À la lumière des commentaires de Kristina, craignez-vous que l’immobilier commercial soit le prochain à tomber et les répercussions que cela pourrait avoir sur les banques régionales?

Alessio de Longis:

Je crois que les valorisations sur les marchés tiennent compte de telles possibilités longtemps à l’avance et qu’elles se sont déjà ajustées. Je ne pense pas que nous soyons rendus à un stade du cycle où nous pouvons déduire que l’immobilier commercial est en difficulté à partir du nombre élevé d’immeubles de bureaux inoccupés. Les évaluations reflètent l’évolution du marché. L’exemple des politiques de retour au bureau utilisé par Kristina me fait penser à la phrase suivante : « ce qui compte, c’est que les choses s’améliorent ».

Brian Levitt:

Que la situation s’améliore, oui.

Alessio de Longis:

La situation s’améliore-t-elle, peu importe à quel point elle était mauvaise au départ? En ce moment, je n’ai donc pas d’inquiétude au sujet de l’immobilier commercial. Les ajustements sont essentiellement terminés. Compte tenu de ce que nous avons dit quant à notre capacité d’apprendre de nos erreurs à l’égard de l’inflation depuis environ 18 mois, je considère qu’un risque subsiste du côté des actions américaines à long terme qui sont conservées encore après 15 années de marché haussier. On y trouve des titres de qualité, mais surtout des titres de croissance. Je crois que les pondérations demeurent trop élevées dans cette catégorie d’actif. Si nous continuons à sous-estimer les facteurs cycliques et à long terme qui sont réellement à l’origine de l’inflation et si le présent cycle de resserrement venait à se prolonger, le portefeuille pourrait être à nouveau malmené. C’est pourquoi il serait préférable d’accroître les pondérations des titres de valeur, des petites capitalisations et d’autres régions.

Je crois que le risque de concentration se trouve dans les marchés boursiers axés sur les titres de croissance. À mon avis, la diversification est encore la solution qui permet d’équilibrer les risques, d’obtenir des dividendes et de mieux dormir la nuit.

Brian Levitt:

Lorsque Jodi et moi avons eu l’idée de ce balado, nous voulions que ce soit comme aller prendre un café ensemble. Maintenant que nous retournons tous travailler au bureau, j’espère que nous aurons vraiment l’occasion de prendre un café ensemble.

Kristina Hooper:

Absolument.

Jodi Phillips:

J’y compte bien.

Alessio de Longis:

Promis.

Brian Levitt:

Nous vous remercions énormément de votre présence.

Jodi Phillips:

Merci beaucoup d’avoir pris le temps d’être avec nous.

 

Disclosures:

NA2960999

Renseignements importants

Date de l’enregistrement : 12 juin 2022

Ce document fait référence aux États-Unis et son contenu peut ne pas s’appliquer au Canada.

Les opinions exprimées dans ce document sont celles des conférenciers; elles sont fondées sur les conditions de marché actuelles, en date du 12 juin 2023, et peuvent changer sans préavis. Ces opinions peuvent différer de celles des autres spécialistes des placements d’Invesco.

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La diversification et la répartition de l’actif ne peuvent éliminer les risques liés à la fluctuation des cours et l’incertitude des rendements. En outre, elle ne garantit aucunement la génération d’un profit ou la protection contre les pertes.

De façon générale, la valeur des actions fluctue, parfois beaucoup, à la suite d’activités propres à la société concernée ou en fonction des conditions du marché, de l’économie ou de la situation politique.

Les placements en titres à revenu fixe sont exposés au risque de crédit de l’émetteur et subissent les effets des variations de taux d’intérêt. Les cours des obligations baissent généralement lorsque les taux d’intérêt augmentent, et vice versa; c’est ce qu’on appelle le « risque de taux d’intérêt ». Un émetteur peut se retrouver dans l’incapacité de payer les intérêts ou de rembourser le capital, ce qui entraîne une baisse de la valeur de ses titres et de sa cote de crédit.

La valeur des obligations spéculatives fluctue davantage que celle des obligations de grande qualité et peut subir de fortes baisses sur de courtes périodes.

Les risques liés aux placements dans des titres d’émetteurs étrangers, y compris sur les marchés émergents, peuvent inclure les fluctuations de change, l’instabilité économique et politique et les particularités fiscales des pays étrangers.

Dans le cas d’un placement de style valeur, il existe un risque que les évaluations ne s’améliorent pas ou que les rendements soient inférieurs à ceux d’autres styles de placement ou de l’ensemble des marchés boursiers.

Les actions de petites et moyennes entreprises ont tendance à être davantage exposées aux changements défavorables et peuvent être plus volatiles ou moins liquides, ou être soumises à des restrictions relativement à leur revente.

Les placements dans des instruments immobiliers peuvent fluctuer en fonction de facteurs économiques, juridiques ou environnementaux qui se répercutent sur les valeurs des biens, les loyers ou les taux d’occupation des immeubles. Les entreprises immobilières, y compris les FPI ou des structures similaires, sont généralement des sociétés à petite ou moyenne capitalisation et leurs actions peuvent être volatiles et peu liquides.

Un placement dans un fonds commun de placement peut donner lieu à des commissions, des commissions de suivi, des honoraires de gestion et autres frais. Les fonds communs de placement ne sont pas garantis, leur valeur fluctue souvent et leur rendement passé n’est pas indicatif de leur rendement à venir. Veuillez lire le prospectus simplifié avant de faire un placement. Des exemplaires sont disponibles auprès d’Invesco Canada Ltée. Les opinions exprimées dans ce document sont celles du présentateur; elles sont fondées sur les conditions de marché actuelles et peuvent changer sans préavis.

Ces opinions peuvent différer de celles des autres spécialistes des placements d’Invesco. Les énoncés prospectifs ne garantissent pas le rendement. Ils comportent des risques, des incertitudes et des hypothèses. Même si ces énoncés sont fondés sur des hypothèses considérées comme étant raisonnables, rien ne garantit que les résultats réels ne différeront pas substantiellement de nos prévisions.

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InvescoMD et toutes les marques de commerce afférentes sont des marques de commerce d’Invesco Holding Company Limited utilisées aux termes d’une licence.

© Invesco Canada Ltée, 2023

Le rendement de l’indice Nikkei 225 Index est fourni par Bloomberg, L.P., en date du 9 juin 2023. L’indice Nikkei 225 est une moyenne pondérée des cours des 225 plus importantes sociétés japonaises cotées à la première section de la Bourse de Tokyo.

Les renseignements sur les taux des fonds fédéraux proviennent d’une comparaison entre les données de juin 2022 et les données de juin 2023 de la Réserve fédérale. Le taux des fonds fédéraux est le taux auquel les banques se prêtent de l’argent à un jour.

Les taux obligataires sont fournis par Bloomberg, L.P., en date du 31 mai 2023. Les obligations de sociétés de catégorie investissement sont représentées par l’indice Bloomberg US Corporate Bond qui mesure le marché des obligations de sociétés imposables à taux fixe de catégorie investissement. Les obligations à rendement élevé sont représentées par l’indice Bloomberg US Corporate High Yield Bond qui suit le rendement des obligations de sociétés de qualité inférieure libellées en dollars américains et émises sur le marché intérieur américain.

La courbe des taux représente à un moment précis les taux d’obligations de qualité égale, mais assorties de dates d’échéance différentes, afin de prévoir l’évolution des taux d’intérêt et de l’activité économique.

Une courbe des taux inversée est une courbe dans laquelle les obligations à court terme offrent un rendement supérieur à celui des obligations à long terme de même qualité.

Un point de base correspond à un centième de point de pourcentage.

Le resserrement est une politique monétaire utilisée par les banques centrales pour faire baisser l’inflation.

L’assouplissement quantitatif est une politique monétaire utilisée par les banques centrales pour stimuler l’économie lorsque la politique monétaire traditionnelle est devenue inefficace.

La duration mesure la sensibilité du cours d’une obligation ou d’un portefeuille de titres à revenu fixe aux variations des taux d’intérêt.

Les données qui mesurent les effets des dépenses de consommation sur l’économie sont fournies par le US Bureau of Economic Analysis.

Le graphique à points de la Réserve fédérale lui sert à illustrer ses prévisions à l’égard des taux d’intérêt.

Le document Summary of Commentary on Current Economic Conditions constitue un sommaire d’informations anecdotiques sur les conditions actuelles de l’économie recueillies par chaque Banque fédérale de réserve.

Un multiple est un ratio utilisant le cours de l’action d’une société et un autre paramètre financier pour mesurer une valeur. En règle générale, plus le multiple est élevé, plus l’action coûte cher.

L’écart de taux est la différence de taux entre des obligations dont l’échéance est semblable, mais la qualité du crédit est différente.